Du Bigdata à l’auto-surveillance permise par la blockchain
Avec cette vision développée dans cet article :http://www.frenchweb.fr/blockchain-… on finirait donc à assez court terme par avoir théoriquement, seul, l’usage -et la connaissance- de l’ensemble de nos données.Et donc une identité numérique maîtrisée de façon absolue. Maitrise qui, lorsqu’elle nous sera demandée par un tiers – anonyme ou non – à être partagée, pour entrer par exemple dans un groupe social qui exigeraient des “références” et la connaissance de notre passé, ne pourra paradoxalement pas être parcellaire.
Au risque de la suspicion, il faudra donc prouver notre mauvaise foi et donc construire et compartimenter des identités numériques multiples toutes fausses et vraies à la fois.Autrement dit à force de cultiver la notion de privacy d’un côté et de transparence de l’autre, les deux extrêmes se rejoignent, nous sommes en train d’arriver pour nous tous sans le moindre débat à une notion d’identité numérique “quantique” si l’on peut dire : à la fois présente et exposée et également dans le même temps inconnue et invisible, ayant besoin et se servant des autres (rendus comme soi anonymes) dans le principe de la blockchain pour disparaître et apparaître en même temps du groupe, ce qui n’est pas le moindre paradoxe.
L’existence au prix de la disparition et inversement, avec l’illusion de tout contrôler de ses données et de ses relations avec les autres, rendus simples protocoles d’autorisation ou de blocage. Control freak age is coming.
L’image de soi certifiée par le réseau rendra-t-elle nos vies invivables autrement qu’en ligne ?
On ne pourra de fait connaître quelqu’un numériquement uniquement par strates, sans jamais connaître à qui l’on a affaire, le règne des faux semblants sera la norme imposée. L’effet connu actuel de l’usage massif de par exemple Facebook ou Instagram voir aussi Linkedin où l’on se présente sous le meilleur jour souvent inventé dans sa permanence, sera maximisé et systématique, et deviendra preuves d’identités. Papiers d’identités numériques changeants à chaque réseau, voir posts. Avec une Time Line numérique omnisciente dans sa traçabilité et pourtant également définitivement effaçable dans sa globalité, deux usages de la même techno, la blockchain.
Nous aurons donc plusieurs identités simultanées rendues possible par le numérique, à la fois non prouvables globalement et prouvées par lots suivant la volonté de l’utilisateur par la blockchain, et les personnes qui seront en-dehors de cela, que l’on pourrait appeler les mono-identités, non numériques sinon administrativement, passeront pour des benêts, ou pire, comme des déviants.
Ca manque pas d’ego par ici, mais de corps, de bienveillance et de cohérence !
La fin de l’article rebondit sur le fait que l’on pourra peut être casser dans 30 ans les clés privées pour le moment inviolables de la blockchain avec une puissance de calcul aujourd’hui non existante, par exemple avec la technologie des ordinateurs quantiques, qui deviendrait un pharmakon terrible dans cet usage, libérant les données si l’on peut dire, et transformant à nouveau -comme aujourd’hui – un ensemble jusqu’alors constitué de datas individuelles cryptées en un big data largement moissonnable et segmentable. Control freak level humanity.Nous sommes en train de constituer une société ou l’individu ne pourra plus exister dans une seule identité – certes aujourd’hui conventionnelle – mais une pluralité d’identités par définition – et exigence -indéfiniment plurielles et toutes vraies et vérifiables car non-vérifiables en quelque sorte…Et le jour où un état ou plus probablement un groupe privé pourra accéder à l’ensemble de ces identités et leur historique numérique, cela coïncidera avec le point de singularité, à savoir cette étape de l’intelligence artificielle où elle pourra poser et résoudre des problèmes d’elle-même sans apport de données par des humains, et donc se rapprocher de ce qu’on peut imaginer comme étant une conscience artificielle. Aurons-nous alors déjà disparus dans nos multiples identités numériques ?
Les arts martiaux japonais traditionnels cultivent trois dimensions distinctes mais qui n’ont de sens qu’unifiées. Dans les arts martiaux Japonais ce sont l’esprit (l’intention, caractère, désir) SHIN, la technique GI et le corps, TAÏ. Aucun ne prévaut, chacun enrichit et bénéficie à l’autre. Il me semble que nous gagnerions à nous inspirer des arts martiaux et à ne pas oublier son corps, le sien et celui de l’Autre ni les deux autres composantes de cette unité. Aller à la rencontre de soi physiquement et de l’Autre. Avec bienveillance et courage, c’est à dire en allant vers l’autre au risque de la rencontre, pas uniquement en se montrant à l’autre dans le miroir froid et narcissique de l’”écran intelligent” qui réfléchit pour nous, où chacune de nos identités si elle n’est pas rattachée à une corporéité une technique et un esprit, ne pourra qu’être engloutie et oubliée au gré des marées de pixels. Seulement consignée in fine comme disparue dans le grand livre numérique, la blockchain, sans aucun sens ni maitrise de nos vies et de notre plaisir de vivre !Communiquer et vivre en cohérence avec soi et avec les autres dès aujourd’hui, à l’heure de l’explosion de ses identités numériques avec une techno qui tend à prouver numériquement et elle seule la véracité du réel, cela ne peut surtout pas rester qu’une question de technologie.
Perle de rosée
Qu’a voulu prendre en ses doigts
Un petit garçon.
Kobayashi ISSA (1763-1828)