La troisième édition du Forum de la Monnaie et du Paiement électronique en Afrique francophone s’est déroulée le jeudi 19 et vendredi 20 Mars 2015 à l’hôtel Hyatt Regency à Casablanca.

Cette manifestation de grande envergure avait pour but de rechercher les possibilités de développement de la monnaie et du paiement électroniques auprès des usagers et d’élaborer une vision et une feuille de route déclinable en recommandations opérationnelles.

Elle avait également pour objectifs de permettre aux experts et aux opérateurs de la monétique de la région d’Afrique francophone de se rencontrer et d’échanger leurs expériences ou encore développer de nouvelles relations de partenariat et créer un espace de Networking.

Au programme de cette rencontre figuraient six thèmes principaux à savoir: « l’inclusion financière et la bancarisation de la société », « le E-gov avec les effets de la biométrie », « de l’introduction du paiement électronique des services administratifs », « les effets paiement électronique sur le développement des PME et du commerce international », « la ville intelligente ou Smart city et la Sécurité » et « fraude et gestion des risques ».

Afin d’être la plus concise possible, j’aborderais dans ce compte rendu les thèmes les plus récurrents lors de ces deux jours de conférence.

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CADRE INSTITUTIONNEL ET PAIEMENT ÉLECTRONIQUE

Durant ce thème, Monsieur Mounir RAZKI, directeur et responsable de la direction des opérations monétaires et des changes Bank Al Maghrib, est intervenu. Il a expliqué que le système de paiement était une des mission centrale de la banque centrale. Pour l’institution, la stabilité financière n’est possible qu’avec la présence de trois acteurs majeurs qui sont les systèmes bancaires, marchés de capitaux et infrastructures de marché.

Le Maroc, de part son emplacement et son développement, veut se positionner comme un HUB financier et se doit donc d’avoir les meilleures pratiques et normes afin que les investisseurs internationaux puissent se sentir en sécurité lors de leur investissements. L’ultime but et qui revient tout au long de la conférence est le développement de l’inclusion financière et de la bancarisation.

Bank Al Maghrib a ainsi mis en oeuvre une adaptation du cadre règlementaire pour accompagner les évolutions mais également des infrastructures de compensation et des transactions. Monsieur Mounir RAZKI a souligné que la banque centrale s’était grandement inspirée de la BCE (banque centrale européenne) du point de vue du cadre normatif afin qu’il y ait un système de gouvernance efficace. Des réformes ont également été entreprises pour la promotion des paiements électroniques, notamment l’agrément des établissements de paiement.

D’autres intervenants comme Monsieur Le Noir, membre du comité du club des dirigeants des banques d’affaires d’Afrique, a expliqué qu’il y avait de grandes perspectives d’évolution des banques dans l’Afrique subsaharienne (c’est à dire dans la zone franc).

Au terme de différents chiffres énoncés, la banque africaine est clairement appelée à évoluer. Le taux de pénétration de la micro-finance ne représente que 25% de la population alors que 40% de la population, trop pauvre, n’est pour le moment pas « bancarisable ».

Enfin, dernier constat : il y a encore des partenaires « potentiels » qui sont absents du sillage bancaire africain, mais qui devraient certainement arrivés d’ici quelques temps, telles que les banques chinoises, indiennes… Toutefois, il est a noté que la banque islamique n’a pas réussi en Afrique subsaharienne et les banques marocaines ont pris de l’avance sur leur concurrents.

COMMERCE INTERNATIONAL ET PAIEMENT ÉLECTRONIQUE

Ce thème-ci a fait intervenir la douane et les impôts indirects et leur procédure de dématérialisation ainsi que Monsieur Jean Yves Rossi, fondateur de la société CANTON-consulting. Ce dernier a mis en lumière l’augmentation du volume des échanges qui a été multiplié par 25% ces dernières années. Au Maroc, on observe des évolutions très fortes sur les investissements avec une croissance extrêmement rapide. De la même manière, on remarque l’évolution des crypto-monnaies, notamment le Bitcoin, qui se développe assez rapidement en Afrique, aussi grâce au développement du mobile banking.

Il a été expliqué la géométrie traditionnelle, qui se définit par le monopole bancaire d’émission et de gestion des instruments de paiement. Ces géométries traditionnelles sont maintenant confrontées à la combinaison de leviers de changement de nature économique, technologique et d’usage.

De même, on note le sens de la recomposition de l’offre qui s’accélère. Cette dernière se recompose autour de nouvelles typologies de services, qui est notamment poussée par l’Europe avec les prélèvements (SDD), virements et les cartes ou dispositifs similaires. L’écosystème est amené à s’ouvrir avec le cadre européen « SEPA » qui a ouvert les voies d’entrée sur le marché en particulier pour les établissements de paiement et établissements de monnaie électronique, les opérateurs de tierce partie et les établissements de crédit d’un nouveau genre comme Paypal, Apple… Un point d’honneur a été mis sur la régulation. En effet, il est important de passer d’une logique d’instruments à une logique de services de paiement en tentant d’unifier ou du moins de coordonner les approches bancaires/telecom, également faire de la prévention de la fraude une priorité absolue et maximiser la prise en compte des exigences LAB-LAT (lutte anti-blanchiment, lutte anti-terrorisme).

INCLUSION FINANCIÈRE

 Ce fut l’un des thèmes majeure de cette troisième édition de la monnaie et du paiement électroniques.

Plusieurs intervenants, notamment Blaise AHOUANCHEDE, directeur général de GIM-UEMOA au Sénégal, ont donné une définition de l’inclusion financière.

Cette dernière se définit comme l’offre de services financiers et bancaires de base à faible coût pour des consommateurs en difficultés et exclus des services traditionnels.

C’est donc le fait de permettre aux populations pauvres et vulnérables d’accéder aux services financiers (service bancaire de base, micro-crédit, assurances, transferts d’argent, paiement de factures) à des couts réduits. Les services bancaires représentent aujourd’hui des services indispensables pour être intégrés à la société. L’inclusion financière est donc le pendant de « l’exclusion bancaire » qui est directement liée à l’exclusion sociale. Aujourd’hui les mesures d’inclusion financière sont devenues des objectifs importants des banques de détails.

En plus de la pauvreté, les inadéquations des infrastructures – accès au réseau routier dans les zones rurales par exemple, en Afrique ne permettent pas non plus à l’ensemble de la population de pouvoir accéder à des banques. Toutefois, ces dernières années de nouvelles stratégies ont été mis en place pour pouvoir fournir des services bancaires au monde rural et aux populations pauvres, notamment à l’aide du Mobile Banking.

MOBILE BANKING 

Dernier thème abordé durant ce forum, le mobile banking est en plein essor en Afrique. Le leader est le service M-pesa qui a été lancé en 2007 et offre un service sécurisé de paiement, en prélevant une faible commission sur chaque transaction, inférieure à 1 %. En 2010, il y a également eu le lancement d’une plateforme d’épargne nommé M-Kesho et dernièrement en 2012, celui d’une plateforme de crédit : M-Swhari.

Aujourd’hui M-Pesa représente plus de 20 millions de clients actifs, 30 000 points agrées, 10 000 clients recruté par jours, plus de 70% des transactions Mobile Banking et surtout près de 75% de la population non bancarisée utilise ce service.

Le Mobile Banking est donc l’une des solutions afin de développer l’inclusion financière notamment grâce aux couts et à l’accessibilité des services. Par ailleurs, le Mobile Banking permet aux crypto-monnaies de prendre leur envol sur le continent africain.

En définitive, ce forum a été véritablement passionnant, accompagné d’une bonne ambiance et surtout d’une très grande qualité de ses intervenants. Il a été permis d’apprendre, de comprendre et d’appréhender ce qui se passait en matière de développement bancaire et de monétique, non seulement au Maroc, mais également en Afrique Centrale. De plus, il est à noter que l’Afrique est en pleine mutation, et cela se ressentait particulièrement au niveau de ses intervenants dynamiques, pleins d’entrain et d’espoir. Quant au Maroc, nous avons eu la confirmation que ce pays, au carrefour des continents, n’est qu’au début de son apogée et a encore d’heureux jours devant lui.