France – Le Coin Coin https://le-coin-coin.fr Informations, réflexions, contenu francophone sur le sujet des monnaies décentralisées dont le bitcoin. Un magazine sans pub crypto, blockchain et économie. Mon, 13 Oct 2025 09:17:21 +0000 fr-FR hourly 1 69367527 Interview du député Pascal Terrasse https://le-coin-coin.fr/4880-interview-de-pascal-terrasse/ https://le-coin-coin.fr/4880-interview-de-pascal-terrasse/#comments Wed, 07 Sep 2016 08:37:49 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=4880 Pascal TERRASSE a accepté de répondre à nos questions relatives à l’économie collaborative et les blockchains. Député de l’Ardèche, il a remis le 8 février 2016 un rapport sur les enjeux de l’économie collaborative. Ce rapport qui comprend 19 propositions et se fonde sur de nombreuses auditions et sur une large consultation en ligne, conclut […]

Cet article Interview du député Pascal Terrasse est issue du site Le Coin Coin.

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Pascal TERRASSE a accepté de répondre à nos questions relatives à l’économie collaborative et les blockchains. Député de l’Ardèche, il a remis le 8 février 2016 un rapport sur les enjeux de l’économie collaborative. Ce rapport qui comprend 19 propositions et se fonde sur de nombreuses auditions et sur une large consultation en ligne, conclut la mission qui lui avait été confiée par le Premier ministre en octobre dernier.

Quelles sont les suites de votre Rapport sur le développement de l’économie collaborative? Qui a participé à l’élaboration de ce rapport ?

Il s’agit d’un rapport commandité par le Premier ministre, à vocation interministérielle, ayant pour objectif de répondre à une thématique précise qui relève des enjeux de l’économie collaborative afin de nourrir plusieurs textes de lois. Au départ, il y avait le texte de loi sur les nouvelles opportunités économiques que devait porter Emmanuel Macron et en même temps le texte de loi porté Myriam El Khomri sur la réforme du droit du Travail.

Depuis les choses ont évolué, le texte de loi devrait nourrir à la fois le texte de loi porté par Axelle Lemaire et une partie portée par Myriam El Khomri sur ce qui relève du droit du travail et une partie plus fiscale portée par le texte de Michel Sapin (Loi Sapin) présenté au mois de juin prochain sur le collectif budgétaire.

Les véhicules juridiques qui serviront à proposer par voie législative le rapport seront donc composés de trois textes. Les 19 propositions de ce rapport doivent servir d’inspiration afin de nourrir plusieurs projets de lois.

Le rapport a été élaboré avec l’aide d’un inspecteur général de l’action sociale et d’une inspectrice générale des finances. Cependant la méthode de participation à ce rapport a été assez collaborative puisque j’ai fait appel à la plateforme « Parlement et citoyens » pour que son texte soit nourri d’une information citoyenne. Il y a eu 250 contributions de citoyens qui ont pu prendre part au débat à travers un site collaboratif. Finalement, j’ai organisé plus de 70 auditions de professionnels de l’économie collaborative, des administrations et des organisations syndicales.

A partir de toutes ces réflexions, j’ai condensé toutes ces participations et organisé des propositions qui me paraissaient être les plus adaptées à l’économie collaborative. 

Est-ce que vous aviez des affinités particulières à l’économie collaborative ou tout simplement le monde du numérique ?

Je suis rentré dans ce dossier vierge de toute arrière-pensée et j’étais affranchi de mon environnement et libre dans mes appréciations. Cela m’a permis d’avoir suffisamment de recul dans le cadre de cette réflexion. De par mon action de Président du Conseil général de l’Ardèche, j’ai été nourri par les réflexions d’un ancien directeur de France télécom, Jacques Dondoux, l’inventeur du GSM, qui m’avait dit que l’économie numérique allait révolutionner l’économique traditionnelle. Très tôt, il m’avait expliqué qu’il fallait désenclaver notre département par la fibre optique. J’ai donc été le premier Président de Conseil général à mettre en place un réseau public de fibre optique de manière à faire en sorte que la fracture numérique en milieu rural soit atténuée par l’action publique.

Pensez-vous que les pouvoirs publics ont les capacités de répondre à ce type d’économie nouvelle, créatrice de progrès, et est-ce que les lois n’ont pas toujours un « train de retard » face au progrès technologique. Est ce qu’il y a vraiment des solutions concrètes ?

Il faut partir du principe suivant : le temps économique est toujours plus rapide que le temps politique. Or, quand on parle d’économie numérique on est dans un temps qui est supersonique, on aura toujours un train de retard. C’est la raison pour laquelle je préconise dans mon rapport la mise en place d’un observatoire de l’économie collaborative ayant pour vocation d’anticiper les évolutions de ce secteur et qui pourrait au fil de l’eau produire éventuellement de la législation de manière à accompagner cette économie nouvelle.

Je pense qu’il ne faut pas brider l’économie collaborative ou la sur-réglementer au risque de l’abimer. C’est un écosystème en devenir, on est dans une transition économique que l’on pourra évaluer à la fin. Plutôt que de laisser faire les choses, il faut les anticiper et les accompagner. Et, pour les accompagner cet observatoire, qui comprendrait des responsables politiques et acteurs de l’économie collaborative ainsi que des administrations, serait un lieu de débat pour anticiper les évolutions puisque l’on sait que cette économie va disrupter l’ensemble de l’économie.

L’économie collaborative est une économie qui va contourner l’économie traditionnelle et qui a vocation, non pas à l’abimer, mais à la régénérer, à inventer de nouveaux modèles économiques. Les responsables économiques ont intérêt à se préoccuper de ces enjeux modernes qui remettent en perspective un nouveau mode de pensée dans nos organisations et les principes mêmes de production. C’est pourquoi adapter les règlements à ces nouvelles formes d’économie permettra à la France de demeurer une terre de création, une terre d’entreprenariat qui conserve sa compétitivité face au reste du monde.

En quelques sortes, s’agit-il de ne pas tomber dans le piège de Hadopi qui était assez répressif, qui venait après la démocratisation du téléchargement illégal ainsi que des plateformes privées légales, et au contraire chercher à ce que l’Etat anticipe et soit une partie prenante et non un Etat policier ?

Bien sûr, l’idée est d’anticiper les évolutions économiques dans tous les secteurs et non pas d’avoir une vision segmentée de l’économie. On sait que l’économie collaborative s’inscrit dans un champ très large qui touche toutes les activités.

Le premier secteur qui a été touché par l’économie collaborative est le secteur de la création artistique avec la loi Hadopi. Des jeunes ont d’abord créé des réseaux d’échange de musique en pair-à-pair. Ils ont ensuite basculé vers un système où ils ne souhaitaient plus être propriétaires de disques mais propriétaires d’un usage de la musique, qui sera développé par Spotify ou Deezer.

Lorsque l’on regarde le passé, on a eu Hadopi, les problèmes d’hier et d’aujourd’hui qui sont posés par Uber, et actuellement la problématique d’Airbnb. On voit que l’économie collaborative va toucher tout type d’activités et pas seulement le tourisme ou le transport. L’idée que je préconise est que la France doit avoir l’agilité d’une start-up dans son organisation et faire en sorte que ce secteur émergent soit accompagné pour le valoriser et pour permettre à l’économie traditionnelle de faire sa mutation. Car l’économie traditionnelle, soit elle s’inscrit dans une logique d’opposition frontale  à cette économie numérisée, soit elle s’adapte et s’organise. Au fond, le plus bel exemple est Uber, si la gestion des taxis traditionnels s’était intéressée à la géolocalisation, nous n’en serions peut-être pas là aujourd’hui. Il ne faut jamais brider un service ou une action moderne et nouvelle. Ce serait comme dire que l’on est contre l’électricité au moment où celle-ci a été créée. Le progrès nous rattrape toujours.

Le pair-à-pair est un système résilient par essence. Et aujourd’hui, toutes les relations  qui ne sont pas dans le pair-à-pair, mais qui sont en CtoC, en BtoC, s’imposeront à nous dans tous les cas, puisque l’on ne bloquera jamais les réseaux internet. Ma définition au fond du rôle politique est à la fois l’anticipation et l’accompagnement mais surtout pas des prises de décision qui interviennent trop tard et qui seraient contraires à une économie ouverte dans un monde ouvert.

Seriez-vous capable de définir de manière concise ce que l’on peut entendre par économie collaborative ?

Définir l’économie collaborative est très difficile et cela fait partie de la mission qui a été la mienne. En réalité, c’est un concept qui a été inventé il y a une trentaine d’années et qui reposait sur les services locaux (communément appelés par leur acronyme SEL). A l’origine, cette économie est très territorialisée et ne s’appuie pas sur le numérique, il s’agit d’une économie de l’échange et du troc qui a vocation à créer du service.

Néanmoins, l’avènement des plateformes numériques a massifié cette économie par l’avènement du digital. Dans ma définition, l’économie collaborative, ce n’est surtout pas l’Ubérisation de la société, mais d’abord un moyen qui permet à travers l’intermédiation d’une plateforme de faciliter l’acte d’échange, de troc ou de service. Ce que je relève dans l’économie collaborative, c’est que l’on change de paradigme dans le cadre d’une prestation, où pendant très longtemps le producteur vendait un bien. Aujourd’hui on est plus sur une valeur d’usage. C’est plutôt la mise à disposition par un prestataire d’un service, d’un usage intermédié par une plateforme numérique. Voilà comment je définirais le dispositif en sachant que je fais la différence entre l’acte professionnel et l’acte d’un particulier. On peut en effet avoir un producteur consommateur qui est un particulier mais il peut y avoir aussi un producteur de service qui est professionnel.

Ne pensez-vous pas que les intermédiaires sont voués à disparaitre puisqu’ils exercent une certain prédation économique ? Lorsque l’on voit des technologies comme la blockchain qui permettent de s’affranchir de cette intermédiaire, la finalité de l’économie collaborative n’est-elle pas de se passer totalement d’intermédiaire ?

En réalité, je n’aborde que très peu la blockchain dans mon rapport. C’est l’étape suivante puisque l’économie collaborative n’aura qu’une durée limitée et que l’on arrive maintenant à des systèmes de « communs » qui appartiennent à tout le monde et se mettent en place petit à petit. Au fond, le plus bel exemple est Wikipédia, qui est un « commun », dont la valeur est créée par l’utilisateur et celui qui va contribuer à l’enrichissement de l’information. Demain, en réalité, il y aura des plateformes qui seront des « communs » et qui appartiendront autant aux producteurs de biens qu’aux consommateurs.

Je pense que les premiers à être disruptés ou ubérisés seront les plateformes telles qu’Uber notamment par une blockchain commune qui appartiendra aux utilisateurs : les taxis, mais aussi demain des clients, qui pourront eux-mêmes enrichir la plateforme sans intermédiation. L’économie collaborative a tué les intermédiaires économiques et la blockchain va tuer l’intermédiation.

En fait c’est un système transitoire du fait de l’arrivée à venir de ces « communs ». Mais ce sont des notions assez compliquées à comprendre lorsque l’on n’est pas initié. On en mesurera les conséquences dans deux ou trois ans, et l’on ne parlera sans doute plus d’économie collaborative mais de blockchain. Il y aura des systèmes de paiement avec des monnaies qui seront virtuelles, où l’on pourra vendre des biens, des services avec une sécurité redoutable puisqu’organisée par la communauté. On sera donc sur des systèmes très communautaires.

En tout état de cause, je suis favorable à l’accompagnement de tous ces changements. Mais en termes économiques, nous parlons là des « premiers habitants sur Mars ». Quand j’explique dans des colloques que l’économie collaborative disrupte l’économie automobile puisqu’aujourd’hui on est simple propriétaire d’usage grâce aux activités de partage de véhicule, où que j’explique que demain il sera possible pour les particuliers d’imprimer des moteurs de voitures sans permis avec des imprimantes 3D, les gens ne me comprennent pas forcément. Cela a par le passé été le cas de celui qui m’avait expliqué que j’aurai un jour un smartphone avec autant de microprocesseurs qu’il y en avait lorsque Soyouz est allé sur la Lune.

Il faut aujourd’hui avoir cette vision de ce que sera la société dans 30 ans et la blockchain sera l’évènement majeur qui va changer la relation que l’on a avec l’économie. D’ailleurs cela changera la relation que l’on a avec le fort et le faible. Quand on est consommateur, on est toujours affaibli par rapport à la production d’un bien. On sera là dans une forme d’égalité. Il y a dans l’économie collaborative cette idée de changer la nature des rapports de force, et c’est aussi une forme d’organisation d’une société vers une sobriété volontaire. On va organiser cette sobriété puisque cette économie sera source d’énergie, de matières premières ou l’épuisement de l’obsolescence programmée pour l’instant créatrice de valeur boursière. On est dans un changement de paradigme pas seulement productiviste et économique mais aussi sociétal. Ceux aujourd’hui qui commencent à regarder ces sujets-là permettent l’ouverture d’un débat politique fabuleux. Ce qui est également important, c’est que l’on va changer nos modes d’organisation. On est actuellement dans une logique verticale, très corporate concernant les rapports de force. Là, nous sommes dans une logique d’organisation horizontale : c’est le collectif qui amène la force, chacun aura une contribution à améliorer un dispositif. On sera donc sur des organisations beaucoup plus horizontales et les sociétés qui n’ont pas compris ce changement majeur auront de grandes difficultés demain à faire des recrutements et à inventer le futur.

Nous avons bien saisi la liberté que peut apporter l’économie collaborative mais si l’on revient sur des sujets plus juridiques tels le droit du travail, certaines difficultés semblent exister. En ce sens, y a-t-il des risques relatifs à l’absence de reconnaissance de ces acteurs par le droit du travail ?

La génération de mon père, qui a vécu l’ère industrielle et les Trente glorieuses, avait une vision : la formation pour le travail toute une vie dans une seule et unique entreprise. Ma génération, à savoir les années 1980, avait une vision différente : la nécessité de flexibilité dans le travail afin de pouvoir convenir à plusieurs employeurs, adapter sa formation aux différentes situations. La génération du jeune d’aujourd’hui est encore différente. En plus de ne pas avoir un travail permanent dans la même entreprise, il sera en réalité un acteur, un producteur de richesses, de valeurs, mais avec des statuts très différents. Une partie de la journée ou de la semaine, il sera salarié et à d’autres moments il sera indépendant ou prestataire. Il s’agit d’une situation à la fois intellectuellement intéressante mais également très insécurisante pour ce jeune.

C’est pourquoi, il faut que la puissance publique adapte des sécurisations utiles et nécessaires à ces acteurs. Tout d’abord, il faut faire vivre le Compte Personnel d’Activité, qui est un compte permettant la protection sociale non pas en fonction de la nature de l’activité mais de l’individu. Et de même, dans la perspective d’un débat politique à venir, il faudra ouvrir la possibilité d’un revenu universel de manière à sécuriser l’ensemble des acteurs économiques ayant des statuts différents.

Je suis favorable à terme à l’idée non pas de créer un statut particulier pour les acteurs de l’économie collaborative, tel que cela m’a été demandé, au risque de se trouver dans une situation où l’on licencie ses propres salariés pour les envoyer vers un statut low-cost. Je suis plutôt dans la logique de préconiser la convergence des droits sociaux entre indépendants et salariés, alors qu’en France on a à peu près 90% de salariés.

Pensez-vous que l’on est face à des personnes qui sont de fait salariés, qui seraient peut-être juridiquement reconnus salariés, mais qui sont pour l’instant dans le statut parfois précaire d’auto-entrepreneur ?

La véritable précarité, c’est le chômage chez les jeunes aujourd’hui. En réalité ce que nous disent ces jeunes chauffeurs, c’est que l’on préfère ça à la véritable précarité puisque de nombreux chauffeurs sont issus des banlieues et des lieux où le chômage est le plus élevé chez les jeunes. Ces jeunes préfèrent cela à la véritable précarité qui est l’inactivité. En réalité, derrière ces jeunes qui se sont engagés dans l’auto-entreprenariat et qui font beaucoup d’heures en gagnant peu leur vie, il y a cette ambition de pouvoir réussir. Il s’agit d’un premier pied à l’étrier dans l’activité. Parce que ces jeunes souvent issus de milieux modestes n’ont pas accès aux stages, aux premiers emplois, cela leur permet de se sociabiliser avec la vie du travail et d’améliorer leur ordinaire pour faire autre chose.

Donc, il vaut mieux voir cela comme un premier pas dans la vie active, mais en même temps, ce que je dis dans mon rapport c’est que la précarisation existe. Il faut faire attention sur le lien de subordination : on est dépendant économiquement d’une plateforme mais également dépendant d’une coopérative, ou d’autres secteurs d’activité. Il faut être prudent sur ce lien de subordination, et moi je laisse ce sujet à l’appréciation du juge. Pour le moment le lien de subordination dépend du contrat de travail, et quand je vois à quel point il est difficile de modifier le code du travail, je me demande quel responsable politique sera capable de le faire.

Je ne suis pas convaincu aujourd’hui qu’un chauffeur Uber qui a le choix de son lieu de travail, le choix de ses horaires de travail et clients soit considéré comme un salarié normal au titre d’un contrat de travail traditionnel. Car si l’on considère que quelqu’un qui travaille quand il souhaite et qui organise son activité comme il le sent, ce qui vaut pour un chauffeur Uber vaut pour n’importe quel salarié en France.

Comment appréhender les cas de concurrence déloyale que les professionnels revendiquent notamment lorsqu’ils sont tenus d’obligations imposées par la loi contrairement aux particuliers proposant des services similaires ?

Je suis sensible à la concurrence déloyale. Car certaines obligations existent pour les professionnels, notamment en termes de normes de sécurité. Ce qui n’est pas forcément le cas pour les particuliers qui  louent leur appartement sur une plateforme. Vous ne pouvez pas demander le même niveau de prestation chez un particulier que chez un professionnel.

Si aujourd’hui vous êtes considéré comme un loueur de meublés pour touristes, vous devez payer la fiscalité normalement. Si, en revanche, vous louez votre résidence principale à titre occasionnel, vous n’entrez pas dans ce champ concurrentiel. Il faut distinguer ce qui relève d’une action qui va occasionnellement mettre à disposition une prestation d’un professionnel.

C’est pourquoi, mon rapport ne crée aucune taxe nouvelle. Il ne fait que rappeler la loi. Il va même plus loin et demande à l’administration de faire du rescrit fiscal puisque certains secteurs sont mal mesurés. Il y a un besoin que l’administration fiscale nous donne des informations lisibles sur le droit fiscal, ce qui pour le moment est très compliqué. Par exemple sur le prix d’un véhicule, on sait que l’amortissement est en moyenne de 6 000 euros par an. Chaque Français peut donc en théorie défalquer de son impôt sur le revenu cette somme. Si les gains de la location de votre véhicule accumulés sur une année sont inférieurs à 6 000 euros, on peut considérer que vous êtes dans l’économie du partage et, à ce titre, vous ne pourrez pas être fiscalisé. En revanche, si vous en tirez plus de 6 000 euros de gains annuels, vous êtes considéré comme un loueur de véhicule et devrez vous acquitter de l’impôt sur le revenu en conséquence. Ce que je reproche au système actuel, c’est que l’on a des professionnels qui habilement se sont glissés dans l’économie collaborative pour échapper à toute norme et toute fiscalité.

Pour terminer, pensez-vous qu’il est possible pour l’état français de lutter contre la défiscalisation des entreprises facilité par la dématérialisation des activités concernées ?

C’est un sujet qui ne relevait pas au départ de ma mission pour ce rapport. En réalité, l’ère numérique a mis en évidence des sociétés multinationales qui font de l’efficacité fiscale une source de revenus non négligeable (Google ou Amazon par exemple). Ayant leur siège fiscal dans des paradis fiscaux, elles ne paient donc pas ou très peu d’impôts.

D’une manière générale, les Etats ont bien compris qu’aujourd’hui il y a une grosse partie de la fiscalité qui leur échappe. Le G20 à Antalya en Turquie l’an dernier a convenu que l’accord BEPS de l’OCDE devait se mettre en place, ce qui est très important. En réalité ce que les Etats du G20 ont convenu c’est que chaque entreprise, dans le cadre des accords de l’OMC, devra payer ses impôts dans l’Etat où elle exerce son activité. C’est un accord qui devra avoir une portée internationale. Néanmoins, il faudra peut-être deux ou trois ans avant sa mise en place. Cette volonté est aujourd’hui exprimée, et dans mon rapport, j’indique qu’il faut que le Gouvernement français soit un acteur plein et total de manière à ce que des décisions multilatérales soient prises dans les meilleurs délais.

Il faut cependant être prudent. Comme toujours, nous regardons notre économie avec l’œil qui nous concerne très directement. Par exemple, Google qui ne paie pas ses impôts en France. Il ne faut pas oublier que des établissements français ont des activités à l’étranger et, pour certaines, ne paient pas leurs impôts à l’étranger. Ainsi, ce que nous allons gagner d’un côté, nous risquons de le perdre de l’autre. Si l’on prend par exemple Le Bon coin, entreprise finlandaise, dont le siège fiscal est en France et qui a des activités en Suisse. Il s’agit d’une entreprise qui paie l’intégralité de ses impôts en France aujourd’hui et qui sera demain amenée à payer ses impôts partout ailleurs. Le montant collecté par l’Etat français au titre de l’impôt sera plus faible car Le Bon coin sera obligé de déclarer ses revenus dans chaque pays et de payer la fiscalité en conséquence. Nous serons donc perdants.

Dans tous les cas, ce système sera plus équilibré. Pour l’opinion publique, il y a un besoin d’un discours véritable sur la transparence fiscale. On voit par exemple qu’Airbnb a son siège social en Irlande et que celui d’Uber est aux Pays-Bas. Tous deux font de l’efficacité fiscale un moteur de leur croissance, ce qui n’est pas acceptable et pas compréhensible par l’opinion publique.

Propos recueillis en Mai en collaboration avec Florent GASSIES, Elève avocat, dans le cadre de la revue des élèves avocats : le Baromaître. (numéro 3 de Juin 2016)

Crédits photo : CLEMENS BILAN/AFP

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La Blockchain au Club Parlementaire des Nouvelles Révolutions Industrielles https://le-coin-coin.fr/4677-blockchain-club-parlementaire-nouvelles-revolutions-industrielles/ https://le-coin-coin.fr/4677-blockchain-club-parlementaire-nouvelles-revolutions-industrielles/#comments Wed, 29 Jun 2016 21:27:26 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=4677 Hier soir, le 28 juin 2016, le Cercle du Coin était convié, j’y ai représenté l’association, au dîner du Club Parlementaire des Nouvelles Révolutions Industrielles avec un débat sur les enjeux de la Blockchain. Après un apéritif permettant de faire connaissance et de naviguer entre les visages, nous nous sommes mis à table, le repas […]

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Hier soir, le 28 juin 2016, le Cercle du Coin était convié, j’y ai représenté l’association, au dîner du Club Parlementaire des Nouvelles Révolutions Industrielles avec un débat sur les enjeux de la Blockchain. Après un apéritif permettant de faire connaissance et de naviguer entre les visages, nous nous sommes mis à table, le repas constituant le coeur de l’évènement, dans un salon de la Maison de l’Amérique Latine à Paris.

Apéritif Blockchain
L’apéritif dans les jardins de la maison de l’Amérique Latine.

À la table d’honneur, nous trouvions Madame Laure de La Raudière, députée LR d’Eure-et-Loir et Monsieur Olivier Faure, député PS de Seine-et-Marne, tous deux organisateurs de l’évènement. Mais aussi trois intervenants : Pierre Noizat, Henri d’Agrain et Primavera de Filippi. Avant même que l’on ne serve l’entrée, cette table a commencé à animer le débat en présentant rapidement la blockchain et les possibilités qu’offre cette architecture de réseau.

Après une intervention de chacun sur cette table d’honneur, la parole est passée à la salle, dans un jeu de questions réponses qui était selon Olivier Faure le plus rythmé depuis la création du club. On a réellement pu voir un engouement sur les questions relatives à la Blockchain. Ainsi se trouvaient dans la salles de nombreux institutionnels : députés, sénateurs, collaborateurs parlementaires, représentants d’organisme public comme la BPI ou la Caisse des Dépôts etc.. Et de l’autre côté des acteurs privés comme Cisco et des acteurs de l’écosystème blockchain comme le Cercle du Coin, Ledger, Paymium, Belem et d’autres.

Sur la quarantaine de personnes présentes, près d’un cinquième ont participé au débat en posant une question, et ces questions étaient très diverses. Il y a eu les habituels problèmes d’abstractions auxquelles la blockchain nous oblige à faire face, sujet sur lequel Pierre Noizat a clairement rappelé qu’il ne faut pas parler de technologie blockchain mais bel et bien nommer les choses par leur nom, comme Bitcoin.

Il a été difficile de passer à côté d’une petite boutade sur M. Bernard Debré et ses envies meurtrières du moment envers Bitcoin. Puis est venue la question de la fiabilité : les craintes sont présentes notamment depuis l’histoire de la DAO. À ce sujet, les intervenants sont bien revenus sur le fait que la blockchain d’Ethereum n’avait pas été touchée et que l’exécutant avait simplement joué avec les règles du smart contract.

Beaucoup de palabres ont tourné autour d’une possibilité pour l’État d’utiliser des réseaux publics pour des fonctions notariales. Avec notamment de l’incompréhension parfois entre l’aspect monétaire des tokens de la blockchain et leur valeur probatoire. On sent tout de même un certain consensus sur le fait de reconnaître un caractère probatoire à la blockchain. Encore faut-il la nommer.

La dématérialisation fait aussi un peu peur dans le cas du vote. Certains élus voyaient une désertion totale possible des lieux de vie de la communauté si tout le monde reste dans son coin pour effectuer toutes les démarches. Mais cette inquiétude n’est pas forcément fondée car dans un premier temps tous les français ne sont pas à l’aise avec un ordinateur et internet. Il y a donc fort à parier qu’il devra y avoir du soutien dans les Mairies (c’est bien ce que nous ressentons lors des journées organisées par les « Villes Internet » dont notre « Cercle » est partenaire) et dans un second temps le lien avec le monde physique devra forcément passer par des repères public permettant de vérifier l’intégrité des données sur le réseaux.

Au total, c’est dans un climat d’échange courtois que s’est déroulé le repas. Si l’on en croit l’attention portée à ce que les personnes prenant la parole parlent dans le micro, il devrait y avoir un enregistrement de cette soirée. Je ne peux vous garantir cependant que celui-ci sera public. S’il fallait conclure, je dirais qu’il y a un véritable désir de comprendre le phénomène et l’écosystème blockchain chez une part des institutionnels et de ne pas refaire les mêmes erreurs qu’avec le minitel. Même si tous les députés ne sont pas forcément sur cette ligne, ceux qui s’engagent dans cette voie sont réellement dans un désir d’échange et d’écoute entre les différents acteurs et partis de sorte à appréhender le mieux possible ce nouveau paradigme pour que la France puisse être au premier plan mondial dans ce domaine.

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Le puzzle Blockchain : finance, régulation et politique https://le-coin-coin.fr/4509-puzzle-blockchain/ https://le-coin-coin.fr/4509-puzzle-blockchain/#comments Mon, 06 Jun 2016 14:04:34 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=4509 Après l’Ordonnance Macron du 28 avril, l’amendement présenté le 13 mai par Madame Laure de La Raudière, députée de la 3ᵉ circonscription d’Eure-et-Loir, est un second épisode de l’intervention des politiques français dans l’institutionnalisation de la « technologie blockchain ». Madame de La Raudière propose que les opérations effectuées au sein d’un système organisé selon un registre décentralisé permanent et infalsifiable de […]

Cet article Le puzzle Blockchain : finance, régulation et politique est issue du site Le Coin Coin.

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Après l’Ordonnance Macron du 28 avril, l’amendement présenté le 13 mai par Madame Laure de La Raudière, députée de la 3ᵉ circonscription d’Eure-et-Loir, est un second épisode de l’intervention des politiques français dans l’institutionnalisation de la « technologie blockchain ».

Madame de La Raudière propose que les opérations effectuées au sein d’un système organisé selon un registre décentralisé permanent et infalsifiable de chaine de blocs de transactions constituent des actes authentiques au sens du deuxième alinéa de l’article 1317 du code civil. L’Autorité des marchés financiers habilite le système répondant aux conditions de sécurité et de transparence définies dans un décret pris en conseil d’État.

Sa définition (un système organisé selon un registre décentralisé permanent et infalsifiable de chaine de blocs de transactions) est à comparer à celle de l’article 223-12 du CMF dans l’ordonnance Macron : un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant l’authentification de ces opérations, dans des conditions, notamment de sécurité, définies par décret en Conseil d’Etat. Le point commun, qui saute aux yeux, est évidemment de renvoyer au Palais Royal et à Bercy la charge de gérer la chose dans ses détails. Voir ici ce qu’est un décret en Conseil d’Etat.

Or les détails sont au coeur du sujet.

Quand on parle de la Joconde, il s’agit implicitement de celle de Léonard. Parler d’une Joconde, quelque soit son antiquité ou son originalité, nécessite de donner plus de précision.

Parler d’une blockchain sans expliciter si elle est (ou non) celle de Satoshi Nakamoto, c’est ouvrir la voie à la constitution d’une catégorie fourre-tout dans laquelle il ne sera pas dfficile de glisser des produits douteux.

Bien sûr, on peut faire comme pour l’omelette de la mère Poulard, dont chaque gargote du Mont Saint-Michel clame qu’elle a la recette originale : du moins chacune y met-elle quand même des oeufs ! Or ni Mme de la Raudière ni M. Macron n’entendent dire s’ils mettront des oeufs dans leur omelette ou des tokens intrinsèques dans leur blockchain (sans doute ne se l’interdisent-ils pas) et ils préfèrent donc aborder la chose par le résultat.

Pour l’instant ce que l’on sait de leurs blockchains tient donc principalement en quelques imprécisions.

D’abord elle doit être décentralisée (La Raudière) ou partagée (Macron). Le chiffre 2 étant la plus petite expression du pluriel, un registre distribué entre un établissement et sa filiale ad hoc serait partagé ; si en outre les deux noeuds sont à distance raisonnable (disons, de l’autre côté de la rue) on pourrait parler de décentralisation. Trêve de plaisanterie : une blockchain consortiale comblerait tous les voeux de ceux qui leur ont suggéré leurs rédactions.

Ensuite ledit système ou registre doit, pour Mme de la Raudière être permanent et infalsifiable. Si l’amendement ne dit guère comment sont obtenues ces caractéristiques adamantines, il va plus loin que l’ordonnance qui souhaitait simplement que la chose possédât un niveau de sécurité défini par décret. Mais c’est supposer le résultat acquis. Le registre sera sûr, effectivement, s’il est permanent (c’est dans le concept même de chaîne) et s’il est infalsifiable, tant de l’extérieur que de l’intérieur.

On peut intuitivement comprendre que le caractère infalsifiable de l’extérieur est fonction croissante du nombre de serveurs sur lesquels se trouve une copie du registre distribué et plus encore du nombre de validateurs. À la limite extrême (centralisation) on se retrouve avec le problème de l’étanchéité du silo.

Mais il y a aussi un risque de falsification de l’intérieur. Il est malséant, et probablement socialement risqué, de rappeler l’ampleur du scandale du Libor impliquant un nombre incroyable de banques, sur une très longue période. Que cela se soit conclu par des amendes ou (souvent) par des transactions avec « accord d’immunité », on n’a pas vu que cela ait remis en quoi que ce soit le coeur du système ni la prétention bancaire à exercer un rôle de tiers de confiance.

Or la blockchain-entre-amis confie à un consortium professionnel des tâches qui étaient auparavant assumées à côté, voire en surplomb, de la profession. C’est là qu’il est intéressant d’en venir à l’exposé des motifs présenté sur le site de Mme de La Raudière. L’amendement vise clairement (c’est écrit en gras) à donner un coup de pouce à la « Place de Paris » (sans définition) et plus spécifiquement à ses activités de post-marchés financiers comme celles liées à la conservation des instruments financiers et à la circulation de ces instruments.

On peut d’abord rectifier certaines illusions. Un des auteurs du site Bitcoin.fr (media membre du Cercle du Coin dont je suis le Secrétaire) a noté, sur le site même de Mme de La Raudière, plusieurs points techniques, que je recopie ici : la technologie blockchain est un protocole d’horodatage de preuve d’information mais pas de fichiers à proprement parler. On ne peut donc pas mettre en avant sa capacité de stockage. (…) Les actes ne seront jamais dans la blockchain, ce n’est pas fait pour ça. C’est la preuve par une empreinte numérique de ce document qui est ajouté dans la blockchain, l’empreinte numérique ne permet pas de recomposer le document d’origine (notion de hash cryptographique).

Ces choses-là doivent être inlassablement répétées. Il est curieux de voir comme le premier élément porté aux nues par les thuriféraires de la « technologie blockchain » est systématiquement l’horodatage (une révolution… du 19ème siècle, certes dans une version « centralisée ») avant que ne soit louée la possibilité de stocker sur la blockchain à peu près tout ce qui peut venir à l’esprit humain.

Au delà des illusions, il faut souligner certains risques.

Mme de La Raudière nous épargne les fameux 20 milliards (curieusement on cite toujours le point haut de la fourchette de 15 à 20 milliards avancés dans l‘étude de Santander, en page 15, qui agglomérait d’ailleurs des économies bien différentes). Je passe, puisqu’elle a le bon goût de ne pas en parler, sur le risque de voir les économies promises consister pour une bonne part en licenciements frappant un peu plus encore la classe moyenne supérieure au profit du big business. Mais le point qu’elle met en avant n’est guère plus rassurant : en quoi l’économie considérable de fonds propres nécessaires pour se livrer aux opérations de post-marchés est-elle censée délivrer un meilleur service ?

C’est un point commun à toutes les promesses bancaires sur la « technologie blockchain » que de pas même envisager ce qu’elle pourrait apporter aux clients. Largement issue des intuitions de Madame Blythe Masters (jamais évoquée publiquement, d’ailleurs), cette « technologie » risque d’en porter la marque de fabrique.

Quand Mme de La Raudière souhaite que les opérations de règlement livraison d’instruments financiers ou de devises dénouées dans un système de règlement (…) dont le fonctionnement utilise la technologie dite de la « blockchain » constituent des actes authentiques électroniques de la même manière que les actes passés devant notaires, ses derniers mots doivent être pesés. Certes le projet libertarien de Satoshi Nakamoto visait bien implicitement à éliminer le notaire, mais pas au nom d’un entre-soi de bonne société.

Depuis toujours, le notaire, que Quentin Massys représente vers 1515 avec de petits airs de Joconde, se tient habillé de noir (pas comme les seigneurs) et en surplomb. Et même les seigneurs, mêmes les rois, doivent passer leurs actes civils devant l’homme en noir.

Remplacer le notaire par un instrument précis, un bien commun et auditable, à la robustesse éprouvée depuis des années, serait une chose. Laisser aux seigneurs le soin de fixer les paramètres de « leur » technologie en est une autre, qui n’est pas dénuée de risques.

Lors du point presse de la Commission CSPPCE, le 16 mars,  le fondateur de ce site avait eu l’impertinence de demander à un représentant de la Caisse des Dépôts si les autorités n’envisageaient pas de statuer sur des normes techniques pour les blockchains de sorte à ce que la régulation puissent les encadrer précisément et suivant leur forme. Il obtint une fin de non-recevoir ; quant à la Commission il fut dit aussitôt qu’elle n’émettrait pas d’avis technique. Relire le CR de cette intéressante réunion…

Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de normes. Mais leur élaboration ne se fera pas en plein jour. On restera bien loin de l’esprit d’open source qui est la plus solide garantie de la blockchain du bitcoin. C’est d’ailleurs une conviction hautement clamée par M. Philippe Dewost (CDC) que le tiers de confiance va muter, sans disparaître. Dans cette conception, on n’a guère besoin que d’une base de données distribuée.

BiAudit et régulationen sûr, les autorités devront habiliter la procédure, et sans doute les hommes. Tel est le sens du mouvement actuel qui voit les régulateurs s’intéresser à la Fintech, se doter d’un guichet ad hoc et participer à diverses rencontres autour de la « technologie blockchain » (voir le blog de Patrice Bernard). D’après Maître Michelle Abraham, les services de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) ont été étroitement associés aux travaux sur l’ordonnance Macron. Mais peut-être fut-ce plutôt pour aménager la dérogation au monopole bancaire que pour fixer les paramètres de la future blockchain.

Maître Abraham précisait lors d’une récente conférence qu’un groupe de travail devrait déterminer la faisabilité d’un tel projet, afin notamment de garantir que la technologie est assez sûre et mature pour assurer la tenue d’un registre électronique distribué fiable, sécurisé et susceptible d’être audité.

Il y a de bonnes chances que le groupe de travail fasse la part belle aux futurs utilisateurs, et que nombre de régulateurs ne se forment comme (et en même temps que) les banquiers, au sein des mêmes rencontres, en écoutant les mêmes conférenciers (qui sont tous, par la force des choses, en recherche d’emploi ou de mission de consultant).

enfumageDans ces forums, le bitcoin est expédié rapidement, comme un ancêtre douteux ou un adolescent rêveur, avant que la tribune ne soit monopolisée par les prestidigitateurs de la « technologie blockchain », avec leurs promesses de cadastre au Honduras (qui n’y songerait plus) ou au Ghana (cela dépend), d’oeuvres d’art qui décident toutes seules de leurs coloris, de taxis qui choisissent tous seuls clients et itinéraires, et de milliards d’économies qui valent celles des discours électoraux.

Puis, quand l’esprit est tout troublé, montent à la tribune ceux qui se déclarent noblement agnostiques au sujet des paramètres technologiques et ceux qui assènent des arguments d’autorité en faveur de telle ou telle option qui a le mérite d’aller dans le sens de leurs intérêts.

Enfin le ministre arrive toujours en dernier, pour conclure la séance. Son discours, extrêmement vague, est fictivement considéré comme le clou de la journée et poliment applaudi par tous, hors de toute préférence partisane qui serait jugée incongrue. Au mieux son petit mot, tenant sur une feuille A4 relue dans la voiture, intègre les conclusions du précédent forum, au pire il est écrit par un membre de son cabinet sur la base d’informations fournies par un camarade de promotion faisant carrière dans la finance.

Il faut donc une incroyable dose de maladresse pour aller, comme Madame Le Pen, imaginer que le bitcoin est une invention de la grande banque ! Il est tellement plus simple d’attendre de savoir ce que ladite grande banque fera comme choix technologique…

Les choses iront lentement. Annoncée à coup de trompettes, l’ordonnance Macron donne un coup de jeune à un produit imaginé lorsque Camille Chautemps était président du Conseil, et offre une blockchain de nature inconnue aux plateformes (donc à des intermédiaires!) de crowdfunding qui ont su lui présenter leurs besoins. Cela s’appelle de la com’.

Avant que le big business, qui tourne tant bien que mal sur de vieux programmes patchés de partout ne soit basculé sur une techno encore en preuve de concept, on en saura davantage sur les merveilleuses découvertes du R3 CEV, et le discours sur la « technologie blockchain » sera peut-être devenu plus crédible.

Money Lisa

(toile d’Emilie Grison)

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Compte-rendu de la réunion trimestrielle du Cercle du Coin https://le-coin-coin.fr/4205-compte-rendu-de-reunion-trimestrielle-cercle-coin/ https://le-coin-coin.fr/4205-compte-rendu-de-reunion-trimestrielle-cercle-coin/#respond Thu, 07 Apr 2016 21:34:00 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=4205 Le Cercle du  Coin, qui a tenu le 25 janvier son AG annuelle a tenu, le 4 avril, une première réunion trimestrielle destinée à maintenir le contact et favoriser les échanges avec ses membres. La réunion a eu lieu au siège (le « Sof’s bar ») avec un lien disponible aux membres pour une participation en ligne. […]

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Le Cercle du  Coin, qui a tenu le 25 janvier son AG annuelle a tenu, le 4 avril, une première réunion trimestrielle destinée à maintenir le contact et favoriser les échanges avec ses membres. La réunion a eu lieu au siège (le « Sof’s bar ») avec un lien disponible aux membres pour une participation en ligne.

Etaient présents :

  • Six administrateurs du Cercle : Adli Takkal-Bataille, Jacques Favier, Adrian Sauzade, Jérémie Dubois-Lacoste, Benoît Huguet et Edouard Vallet ; Jean-Yves Rossi ayant dû s’excuser au dernier moment ;
  • Quatre personnes morales : Bitcoin.fr avec ses deux animateurs, Acinq, Labo Blockchain, Ledger, et MineOnCloud (en ligne) ;
  • Sept membres : Yannick Losbar, Michel Foucault, Arthur Bouquet, Didier Bismuth, Sofiane Bouhaddi,  Nicolas Anguelov et Albin Cauderlier (en ligne) ;
  • Un invité : Marc Lionel Gatto

Adli Takkal bataille a commencé la réunion en annonçant que les membres étaient à ce jour au nombre de 35, soit  13 de plus que lors de l’Assemblée Génerale. Autres informations chiffrées pour donner le bilan de ce trimestre : 6 événements auxquels le « Cercle » a été présent en tant que tel, c’est à dire avec mention de son existence et affichage de son logo, et 2 communiqués de presse. Il continue le bilan en passant la parole aux personnes s’occupant des différents projets.

Les  4 chantiers que le Cercle avait lancé en janvier ont ensuite été abordés.

  • Jacques Favier précise que l’idée de lancer un « prix » récompensant une étude universitaire ou autre avait, à l’examen été jugée (un peu) prématurée
  • L’idée de promouvoir un événement sous la forme d’un colloque de haut niveau a, en revanche, été jugée suffisamment intéressante pour être déclinée sous deux formes. D’abord un colloque de type académique : un partenariat est en cours de formalisation avec un établissement universitaire prestigieux, avec lequel un comité scientifique se constitue. Le Cercle sera partenaire de cet événement qui devrait intervenir au début du mois de juillet. D’autre part un événement plus orienté vers les milieux d’affaires pourrait intervenir à l’automne, en partenariat avec Canton Consulting (Jean-Yves Rossi, administrateur du Cercle). Le suivi de ces projets est assuré, au niveau du Cercle par Jacques Favier, Jean-Yves Rossi, Adrian Sauzade et Adli Takkal-Bataille.
  • L’idée de promouvoir un « Bitcoin Boulevard » a été explorée par Jacques Favier et Adrian Sauzade avec quelques commerçants du Passage du Grand Cerf, qui se sont montrés intéressés et seraient en mesure de faire le nécessaire prosélytisme auprès de leurs voisins. Il s’avère que l’idée, pour être mise en place, doit s’accompagner de la mise en place d’une fonction support. Après discussion il est décidé que le projet sera porté en partenairait avec la Maison du Bitcoin, et que l’on proposera à Pay (ou bien au néerlandais BitCasa) de rejoindre le projet, lequel sera suivi, pour le compte du Cercle par Adrian Sauzade, Jacques Favier, Nicolas Bacca, Michel Foucault et Jéremie Dubois Lacoste.
  • L’idée de mettre au point un logiciel de vote a été explorée par Adli Takkal Bataille et Antoine Ferron, Nicolas Bacca, Adrien Lafuma et Jermy Dubois-Lacoste. Celui-ci devra être accessible à tous et propulsé par le Cercle du Coin.

La parole est alors donnée à Marc Lionel Gatto (my digital city) qui a contacté Le Cercle du Coin pour proposer un partenariat. Il en expose les grandes lignes, autour de son module (600m2) de cité digitale pour laquelle il cherche à mettre en œuvre un système de paiement interne, et à montrer des exemples concrets comme une mairie digitale. De nombreuses idées sont échangées et le principe du partenariat est adopté. Le Cercle pourrait être présent dès le prochain événement (Nice, 17-18 juin).

Jacques Favier fait mention d’un autre partenariat possible, avec les « Villes Internet » qui ont sollicité le Cercle lors des dernières Assises Territoriales de l’Identité numérique à Caen. Le principe est adopté d’une représentation du Cercle lors des prochains événements de ce type.

Pour Beauvais (le 26 mais) ce sont Lola Dam, Arthur Bouquet, Adrian Sauzade, Albin Cauderlier et Jérémie Dubois-Lacoste qui se sont déclarés volontaires (à choisir : 2 ou 3 envoyés semblent suffisants). Pour Verdun (23 juin), ce sont Adli Takkal-Bataille, Jacques Favier  et Albin Cauderlier.

Adli Takkal Bataille présente enfin les modifications apportées sur le site du Cercle, en fait approuver quelques-unes. Le site fera apparaître des liens vers les pages de ceux de ses membres qui gèrent un media. En sens inverses il est rappelé que les membres (sociétés ou médias) du Cercle peuvent et devraient afficher son logo sur leur propre site.

La séance levée, les conversations se poursuivent assez longtemps de manière informelle.

Le 7/04/16 – Le Cercle du Coin

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La Blockchain était à l’honneur dans la petite salle numéro une de l’assemblée nationale ce matin 16 mars 2016. En effet il s’y tenait un point presse concernant le colloque approchant du 24 Mars sur le thème #Blockchain : disruption et opportunités. Votre serviteur était présent sur place et en voici un compte-rendu plutôt factuel suivi d’une conclusion courte relevant plutôt de mon appréciation personnelle.

Tout d’abord, le député Jean Launay, président de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques (CSSPPCE), nous a confié qu’il n’est pas aisé « d’entrer dans cette maison même si c’est le cœur battant de la démocratie. ». Et il est vrai que quelques difficultés se sont présentées pour entrer à cette conférence de presse. Mais trêve d’anecdotes !

Le député a d’abord exprimé son désir de changer de nom la commission au nom un peu long et sonnant ancien. Il serait plus pour « commission parlementaire du numérique et des postes. » qui reflèterait parfaitement le travail des sept députés et sénateurs au sein de celle-ci. Ceux-ci travaillent avec le gouvernement en amont et sont en lien avec les régulateurs. Un point notable de cette commission est son caractère bicamérale et transpartisane, en ce sens qu’elle regroupe toutes les couleurs politiques.

Le désir de la commission est véritablement de se repositionner sur toutes les questions numériques. (sécurité, éducation, accès au numérique) La blockchain était donc un sujet dont cette commission devait s’emparer en nouant des contacts avec les entreprises et personnes exerçant dans ce secteur. Très rapidement le député admet avec une humilité certaine ne pas être lui-même spécialiste de la question et s’interroger fortement sur la question. Mais l’accélération des choses fait qu’il fallait s’y intéresser.

Il commença par évoquer la question du tiers de confiance avec la poste en expliquant que cette notion de tiers de confiance est en train de muter avec l’évolution technologie mais aussi à cause de la loi des grands nombres. Cependant au-delà comment bâtir ce lien de confiance ? Qui contrôle le système ? Quelles sont ces garanties ? Le but du colloque sera donc de permettre de répondre à toutes les questions qu’un député pourrait se poser et aussi d’informer en masse les citoyens sur ces nouvelles problématiques.

LA BLOCKCHAIN VA BOULEVERSER LA CONFIANCE

Des mots émergent. D’abord la presse spécialisée puis la presse grand public. Voici les raisons qui ont poussé à la création de ce comité de pilotage. À ce propos, le député précise que le colloque fait déjà salle pleine et que cela démontre et affirme le besoin d’explications. Il faut anticiper et éduquer tout en conservant le soucis de vigilance. Enfin il faut en saisir les opportunités, comme le titre du colloque l’indique !

Cette introduction terminée, la parole passe à Ludovic Provost, secrétaire général de la commission et personne en charge de l’organisation de ce colloque. Il explique qu’ils ont voulu élargir aux spécialistes extérieurs à la CSSPPCE les tables rondes de ce colloque. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Secrétaire du Cercle du Coin, Jacques Favier participera à cette évènement. Il y avait un véritable désir de ne pas inviter que des acteurs commerciaux de ce secteur.

La question de départ est de se demander comment l’histoire de la confiance a évolué. Quelles sont les opportunités de business que ce nouveau modèle développe ? Quels sont les acteurs sur le marché de la blockchain ? Il y a déjà des « petits malins dans les startups » qui travaillent sur de nouveaux projets. Enfin il ne faut pas oublier la pédagogie et la conclusion du colloque devra être pédagogique. En ce qui concerne la présence d’un ministre, elle n’est pas arrêtée. Il semblerait que le Ministre Macron ne puisse pas s’y rendre et qu’il sera remplacé par Monsieur Mandon.

Vient le tour de parole d’Henry d’Agrain, directeur du Centre des Hautes Études du Cyberespace (CHECY). La première table ronde introduira les concepts de manière simple. À défaut de les maîtriser le but sera dans un premier temps de les comprendre. Le but n’est pas de favoriser une blockchain mais de partir des acteurs et non des mécanismes. Le thème de la confiance et l’articulation de la confiance dans la phénomène blockchain sera ensuite abordé.

Il y a une véritable question sociétale derrière la question de la blockchain. A la base de tout contrat social se trouve de la confiance. Or la blockchain va briser ce mécanisme classique et apporter une réponse extrêmement intéressante et très différente sur cette notion de confiance. Il y a donc un nouveau paradigme à développer.

Les intervenants de cette table ronde seront :

  • Thibaut Verbiest, Avocat rédigeant en ce moment un livre juridique sur la question.
  • Jacques Favier, Historien, et secrétaire du Cercle du Coin, membre actif de la communauté.
  • Pierre Porthaux, trader et créateur d’un cabinet de conseil accompagnant les startups.
  • Gilles Barbier, partenaire de The Familiy

Le député reprend la parole en raison de l’absence de l’animateur de la seconde table ronde Monsieur Rivaton. Le but de cette session sera de mettre les acteurs et investisseurs du secteur en face de la régulation et de ce qu’ils en attendent. Les intervenants seront :

La synthèse sera établie par Luc Belot, député du Maine-et-Loire.

Cette présentation terminée, Monsieur Launay passa la parole à l’animateur de la troisième table ronde Philippe Dewost, Directeur adjoint de la Mission Programme d’Investissements d’Avenir, en charge de l’économie numérique et du financement des entreprises à la Caisse des Dépôts. Il co-animera ce débat avec Nadia Filali, Responsable du Développement des Mandats et des Offices de la Caisse des Dépôts.

Cette table ronde aura pour sujet central la France. Philippe Dewost a débuté par préciser que la cryptographie est l’un des deux piliers de la blockchain avec la théorie des jeux. C’est ce qui explique la présence des intervenants suivant à cette table ronde :

  • Daniel Augot, Directeur de recherche INRIA, au LIX – Ecole polytechnique – Cryptographie
  • Stanislas de Bentzmann, Président de CroissancePlus
  • Bernard Duverneuil, Vice-Président du CIGREF (Club Informatique des Grandes Entreprises françaises), Directeur des systèmes d’information du Groupe Essilor
  • Primavera de Filippi, Chercheuse CNRS/Harvard University

La synthèse sera assurée par Monsieur Lalande sénateur de la Charente-Maritime.

Phillippe Dewost a insisté sur le fait que de nombreuses entreprises, y compris au sein du CAC40, possèdent des experts de la Blockchain mais ne le savent même pas. Le second problème concerne la régulation et l’animateur compte fortement sur les lumières de Primavera de Filippi sur ce sujet. La régulation est bien plus avancée chez les Anglo-Saxons pour M. Dewost.

LES TIERS DE CONFIANCE MUTERONT SANS DISPARAÎTRE

La raison pour laquelle la Caisse des Dépôts participe à l’inititive de place sur la Blockchain est avant tout parce qu’elle ne peut rester indifférente à la question de confiance. En effet la blockchain, sans faire (selon lui) disparaître le tiers de confiance, va cependant le faire évoluer. Le tiers de confiance est invité à changer de nature et cela doit permettre des initiatives pour expérimenter et comprendre ces phénomènes nouveaux.

La commission ne préjuge de rien et ne désire pas mettre en avant une blockchain ou une technologie. Ainsi le Bitcoin ne sera pas mis de côté mais ne sera pas non plus portée au pinacle la preuve de travail (POW). Ainsi la conclusion est que si dans six mois rien n’a été trouvé, tous les acteurs et spectateurs sollicités auront au moins appris sur le sujet grâce à un état des lieux complet.

Henry d’Agrain reprend la parole pour expliquer que le CHECY travaille activement sur le sujet. Plus de 17 personnes ont été sollicitées sur le sujet pour émettre un rapport. Il déplore qu’il y ait si peu d’endroits avec des reflexions académiques sur le sujet. Alors qu’il faut commencer à questionner la Blockchain, les smart-contracts, le concept de DAO, etc.

Le Président de la Commission, le député Jean Launay, enchaîne en présentant le site internet monté pour l’occasion par les étudiants en Master 2 Entrepreneuriat et développement d’activités innovantes au sein de Novancia Business School : www.colloque-blockchain.com. Le twitter de la commission est aussi présenté @CSSPPCE : parlement connecté. Le but du site sera d’émettre un rapport mensuel sur la question avec les avancements de la commission sur le sujet.

S’en suit une série de questions de la part des personnes présentes dans la salle, environ 14 personnes. Paul Gouguer de Challenge débuta avec une question sur Orange. Ont-ils une stratégie différente des autres en raison de leur investissement dans des entreprises blockchain ? Philippe Dewost minimise en expliquant que ce sont des achats de capital risque. Mais qu’Orange explore bien le sujet par ce biais, bien qu’il ne soit pas sûr qu’il y ait des liens directs entre le fonds d’investissement et la maison mère.

Philippe Dewost continue en évoquant avec de fortes louanges Louison Dumont qui s’est auto-formé très tôt et note que celui-ci s’est exilé au États-Unis. C’est un point qu’il faut combattre selon lui car nos créateurs dans ces domaines doivent pouvoir rester en France. Cependant en France aussi des initiatives discrètes existent au sein des entreprises comme Le Preuve développée par un membre de la caisse des dépôts sur son temps libre.

Henri d’Agrain reprend en expliquant qu’il a reçu des entrepreneurs au CHECY et qu’il a été frappé par une thématique. Les personnes qui s’intéressent à la blockchain en France « se planquent »  ! Pour plusieurs raisons : fiscales bien sûr, mais aussi à cause de l’incertitude juridique. Ainsi l’une des ambitions du colloque est de faire comprendre aux entrepreneurs qu’il y a des opportunités en France et qu’il serait malheureux de partir à l’étranger.

Une journaliste de l’Argus de l’assurance se souvient d’un rapport « vindicatif » de Croissance Plus sur le sujet des talents cachés. Elle demande où nous en sommes. Henri d’Agrain pense que les dés ne sont pas encore jetés. Mais le retard sera irrattrapable et c’est pour cette raison qu’il faut anticiper.

Nadia Filali pense que la France n’est pas en retard. L’investissement est concentré dans d’autres pays. Le problème n’est donc pas propre aux fintechs et aux entreprises de la blockchain. Le problème général est que les investissements en seed-money sont trop faibles en France. La caisse des dépôts va mettre en place une chaire à ce sujet. Cependant les entreprises investissant en amorçage se comptent vraiment sur les doigts de la main en France et c’est problématique.

Sur ce, Jean Rognetta note que leur rapport n’était pas vindicatif mais « alarmant ». En effet il y a deux décennies la France avait des avances technologiques concrètes grâce à la carte à puce ou le GSM.  Cependant à cause de la puissance d’investissement américaine, le paiement mobile risque de se faire en Californie. L’encours américain est au alentour de 50 milliards investis, plus d’un milliard à Londres et seulement un milliard dans tout l’eurozone.

Il ne faut donc pas, selon celui-ci, que nous essayons de rattraper notre retard mais d’anticiper sur les prochaines révolutions technologiques. Il faudrait dès lors restaurer notre avance technologique grâce à nos talents en les conservant au pays. Il approuve l’action de la Caisse des Dépôts et voit deux enjeux : la formation et les compétences. 42 serait actuellement en discussion avec l’ESCP pour faire quelque chose.

LA BLOCKCHAIN POURRA-T-ELLE ÊTRE RÉCUPÉRÉE ?

La deuxième chose c’est la gouvernance. En effet les permissionned blockchain permettent de facilement identifier la gouvernance ; mais avec le Bitcoin c’est plus compliqué. En revanche les blockchains privées ne permettent pas les même garanties d’infalsifiabilité que les blockchains publiques. Il rendra public le 24 ses propositions de gouvernance pour la mise en adéquation avec le droit français dans l’optique d’alerter le régulateur sur les enjeux de gouvernance.

Nino Renaud des Echos enchaîne sur une question. Elle a compris que la blockchain R3CEV est une blockchain avec permissions. Donc, n’est ce pas un peu orthogonale, s’interroge-t-elle ? Est-ce que la philosophie blockchain survivra à toutes ces initiatives et n’aura pas le même problème qu’internet avec des entreprises privées hyperpuissantes ?

À cela Phillipe Dewost repond par un parallèle avec TCP/IP quand il avait cinq ans. En effet les concepteurs d’internet ne pensaient pas forcément que le réseau arriverait au point où il en est. Mais qu’on le veuille ou non, puissance ou non, pour l’instant ça fonctionne et c’est la même chose avec les blockchains ou Bitcoin. Donc pour Dewost « c’est bien de s’enthousiasmer après Woodstock en pensant qu’on peut courir nu dans les campagnes » mais l’internet a accouché d’AirBNB et des GAFAs. Cependant, avec sagesse, il ne se prononce pas sur l’avenir de la technologie Blockchain.

Il en profite pour citer Hearn et sa frustration sur la phrase qu’il retient de l’article : Bitcoin est une expérimentation. À cela Daniel Augot de l’INRIA rebondit en expliquant que chacun croit comprendre trivialement son petit bout de blockchain entrant dans ses compétences cependant cela demande une interdisciplinarité telle qu’être expert sur le sujet demande énormément de connaissances.

BITCOIN EST UNE EXPÉRIMENTATION

Une question sur le chiffrement arriva mais elle fut vite écarté par Daniel Augot qui précise à juste titre que quelque soit l’avis des États, le chiffrement sur la blockchain est plus de l’ordre technique que de l’ordre de la communication. Ainsi cela ne joue pas beaucoup dans la balance.

Enfin votre serviteur a demandé ce qu’il en était de la discussion avec les banques quand celles-ci s’avèrent être parfois des freins pour les startups de l’écosystème qui ouvrent difficilement des comptes en prononçant le mot Bitcoin. La question a quelque peu été écartée en citant les contre-exemples existant mais la requête a été comprise. Enfin je me suis autorisé à poser une deuxième question sur l’éventuel but de statuer des normes techniques pour les blockchains de sortent à ce que la régulation puissent les encadrer précisément et suivant leur forme. La tribune m’a précisé que la commission n’émettrait pas d’avis technique.

Qu’est ce que l’on peut retenir de cette conférence de presse ?

Tout d’abord on constate une véritable volonté positive de certaines autorités de l’État de ne pas se faire devancer de nouveau. Il faudra toutefois veiller à ce que l’appareil législatif suive. Ensuite j’ai été agréablement surpris du désir d’aborder le sujet avec une certaine virginité sans prêcher pour une paroisse ou pour une autre notamment au niveau du sujet des blockchains privées. Enfin tous les intervenants sont très renseignés sur le sujet et les tables rondes devraient être enrichissantes. Rendez-vous le 24 !

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Le Cercle du Coin aux Assises territoriales de l’identité numérique du Citoyen https://le-coin-coin.fr/3711-le-cercle-du-coin-aux-assises-territoriales-de-lidentite-numerique-du-citoyen/ https://le-coin-coin.fr/3711-le-cercle-du-coin-aux-assises-territoriales-de-lidentite-numerique-du-citoyen/#comments Thu, 10 Mar 2016 12:23:44 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=3711 À l’invitation de Florence Durand-Tornare, Fondatrice et Déléguée de l’Association Villes Internet Edouard Vallet et Jacques Favier ont assisté à la journée organisée à Fleury-sur-Orne (aux portes de Caen) le 9 mars, au cours de laquelle ils ont pu évoquer les mutations que les utilisations possibles de la blockchain pouvaient susciter dans la « citoyenneté numérique ». […]

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À l’invitation de Florence Durand-Tornare, Fondatrice et Déléguée de l’Association Villes Internet Edouard Vallet et Jacques Favier ont assisté à la journée organisée à Fleury-sur-Orne (aux portes de Caen) le 9 mars, au cours de laquelle ils ont pu évoquer les mutations que les utilisations possibles de la blockchain pouvaient susciter dans la « citoyenneté numérique ».

On trouvera ici  le programme complet de la journée avec les noms et qualités des intervenants.

L’exposé de Guillaume Blot (Direction Interministérielle du Numerique et du Système d’Information et de Communication) présentant le nouveau service FranceConnect fut particulièrement intéressant. En retrouvant, sur les sites les plus divers (aujourd’hui des services publics, mais cela devrait évoluer) le bouton de FranceConnect, le citoyen pourra y accéder en s’étant identifier une seule et première fois : des sites partenaires (la Poste, les Impôts ou le site Ameli de la Sécurité Sociale) jouant en l’occurrence un rôle de « tiers de confiance » pour l’authentification. 

L’ensemble du dispositif (même s’il n’est évidemment pas P2P !) est audacieux. Pourtant il faudra plus qu’une vitrine high tech pour transformer un bâtiment qui reste très classique. Car à quoi servira de commander en ligne une CNI quand on sait que l’Etat laisse les touristes français se débrouiller 5 ans avec des cartes périmées que les douaniers étrangers sont priés de bien vouloir considérer comme valides. Il pourra être très pratique de contrôler en ligne ses points de permis de conduire, mais si l’on doit contester une contravention (et chacun sait qu’il en est des burlesques) on doit imprimer soi-même le document saisi en ligne et l’adresser en RAR… avec la photocopie d’un permis de conduire et d’une carte grise  dont il doit pourtant bien exister une trace dans les data-bases de l’administration. Sans compter que si la communauté d’Amiens Métropole veut offrir toute une palette de services auxquels on pourra s’identifier au choix par son  mobile ou par sa carte bancaire ou encore par sa carte  Pass, il faut encore, pour voter dans une petite ville où l’assesseur vous salue naturellement par votre nom lui exhiber sa carte d’électeur et sa CNI (périmée).

Sans compter l’effet de l’ordinaire cacophonie européenne. Quand Jacques Favier risque une comparaison avec le dispositif de carte d’identité digitale estonienne (qui dispense de tiers de confiance, à la différence du dispositif de France Connect) on lui explique que certains pays n’ont pas de CNI tandis que la France, elle, refuse l’identifiant unique…

Un responsable départemental devait noter par la suite que ce sont aussi les agents qui devront être initiés et transformés par la digitalisation.

C’est à la fin de la pause déjeuner, et dans la salle même du buffet que nous sommes intervenus, non pour faire la promotion du bitcoin comme moyen de paiement – l’audience était très largement faite d’élus locaux et de responsables des services de collectivités locales – mais pour exposer ce qu’est la blockchain et ce qu’elle peut apporter tant pour se passer des tiers de confiance (ou des prédateurs) que pour garantir la sécurité des données personnelles. Les réactions et les questions ont prouvé que nous avions réussi à susciter un réel intérêt.

On retrouve ici l’intégralité de notre intervention :

L’après-midi a été largement consacrée à des interventions d’élus de toutes sortes, tous très impliqués dans divers aspects de la politique digitale de leurs collectivités respectives, et qui ont tenu des propos parfois décapants, et pour nous très instructifs à bien des égards. Les élus locaux sont des gens conscients de ce qu’il y a un foncier numérique, un territoire numérique. Ils se posent la question : comment aménage t-on ce territoire où le virtuel devient la réalité contemporaine ?

On percevait le sentiment de l’importance et de l’urgence de la chose, vue depuis « les territoires » comme un service à rendre à la population et un élément de compétitivité locale, mais surtout comme une nécessité du fait de l’attitude de l’Etat. Et à bien des reprises, nous avons eu le sentiment que l’identité numérique du citoyen, c’était surtout la conséquence d’une digitalisation des services publics d’abord conçue comme un moyen de faire des économies à Bercy, quitte à en renvoyer la charge dans nos campagnes.

Il y a une réelle frustration devant l’attitude de l’Etat qui digitalise par pans entiers sans trop se soucier de la disparition des points d’accueil et en laissant le soin d’expliquer la chose et de réparer les dégâts au seul guichet où les exclus du numériques vont réellement échouer, celui des mairies rurales. Le même jour un candidat de droite annonçait sa volonté de supprimer 350.000 emplois de fonctionnaires. Ne l’ayant appris que sur le chemin du retour, cela nous a dispensé de la petite cruauté qui aurait consisté à demander aux responsables locaux de son parti dans « les territoires » comment ils allaient concilier cela avec ce qu’ils nous présentaient.

Nous ne savons trop que penser en voyant que le fameux « mille-feuilles » des collectivités locales avait trouvé, dans la promotion du numérique, un nouvel espace de déploiement. Successivement nous avons pu entendre le représentant d’une mairie, d’une communauté de commune, d’un département puis d’une région nous en parler, tous avec chaleur, et même l’un d’entre eux avouer tout de go que chacun souhaitait faire de « son » portail la porte d’entrée du citoyen dans l’espace digital.  Il paraît inévitable que cela débouche sur un mille-feuilles digital.

Enfin nous avons senti un réel effroi de personnes bien informées de la réalité sociale du pays devant une fracture numérique que l’on a souvent tendance à cacher, à minimiser ou à décrire implicitement comme temporaire. Pour des « geeks » évoluant entre eux, il est salutaire d’entendre cela et prudent de l’intégrer. La conclusion de la journée  pourrait donc être  « on n’est pas prêt » (entendu plus de 3 fois) et s’appliquant tant aux élus qu’aux agents.

Il est clair que le « P2P » n’est pas le premier souci de responsables politiques. L’usager a été évoqué cinq fois plus souvent que le citoyen. Une question de Jacques Favier sur ce que, selon eux, la citoyenneté digitale pouvait changer à la vie politique (et non simplement à la gestion des guichets administratifs) a été en pratique éludée.

L’intérêt pour la blockchain doit cependant être entretenu auprès de ces responsables, en s’appuyant surtout sur la question de la protection des données. Un maire, cela a été rappelé, est pénalement responsable des données privées qui lui sont confiées.

D’autre part un élu a fait remarquer que l’usager (surtout s’il est jeune) ouvre facilement ses data aux GAFA mais les refuse aux sites officiels. Ceci avait l’air de l’étonner, alors que « FranceConnect » affiche, avec ceux de ses partenaires, les logos de la DGFIP (peut-être peu créateur d’empathie ?) et celui d’un Ministère de l’Intérieur dont l’image, en période d’état d’urgence, n’est pas forcément de nature à susciter la chaleur.

Ce sont probablement les deux leviers qui doivent permettre aux porteurs de solutions conçues sur la blockchain de continuer à prospecter les responsables locaux.

Cet article Le Cercle du Coin aux Assises territoriales de l’identité numérique du Citoyen est issue du site Le Coin Coin.

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Souverainement (bis) https://le-coin-coin.fr/3393-souverainement-bis/ https://le-coin-coin.fr/3393-souverainement-bis/#comments Wed, 13 Jan 2016 14:06:36 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=3393 Certes le Soleil se lève chaque jour. Est-ce une raison pour que nos politiques se comportent chaque nouveau jour comme de petits Rois-Soleil? Le site Numerama nous apprend ainsi que l’ancienne ministre socialiste Delphine Batho et plusieurs députés Les Républicains dont la vice-présidente du parti Nathalie Kosciusko-Morizet, demandent la création d’un Commissariat à la souveraineté […]

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Certes le Soleil se lève chaque jour. Est-ce une raison pour que nos politiques se comportent chaque nouveau jour comme de petits Rois-Soleil?

Le site Numerama nous apprend ainsi que l’ancienne ministre socialiste Delphine Batho et plusieurs députés Les Républicains dont la vice-présidente du parti Nathalie Kosciusko-Morizet, demandent la création d’un Commissariat à la souveraineté numérique qui aurait la responsabilité de créer un système d’exploitation français.

Les réactions négatives n’ont pas tardé. Je suis désolé d’y ajouter la mienne, après celle que j’avais exprimée sur le cloud souverain à la française.

Si cette idée ne devait pas, comme on peut le supposer (cela s’appelle raisonner par induction) conduire à un nouveau gâchis d’argent public, et si un OS à la française devait un jour exister, qui s’en servirait ? Peut-être l’Etat et les acteurs publics. On peut trouver plusieurs exemples de l’attitude contraire, mais faisons l’hypothèse que les acteurs « souverains » se serviraient de leur OS « souverain ». Et s’y enfermeraient, sauf à nous l’imposer par la contrainte, en nous y enfermant.

Et nous? Que nous apporterait un OS à la française?

  • l’usage de la langue française? on peut le regretter mais il est bien tard pour refuser de considérer le globish comme la lingua franca de l’Internet. L’Etat français ne se bat même plus pour imposer notre langue là où elle était juridiquement protégée (ONU, OTAN, UE…).
  • la satisfaction de ne pas enrichir M. William Gates ? Il y a Linux. Même la Chine ou la Corée du Nord (nous voici en bonne compagnie) ont eu ce genre d’idée… et  sont finalement parties sous Linux.
  • une plus grande sécurité ? Nous voici en terrain politique…

Dans l’absolu idée de combattre l’hégémonie américaine sur le « Web français » (il faudrait dire sur les internautes français) et de sauvegarder la confidentialité des données échangées sur le réseau n’est pas absurde. Les révélations d’Edward Snowden sont proprement terrifiantes.

Mais l’État français, qui n’entend pas donner l’asile à MM. Julian Assange et Edward Snowden et l’a fait savoir sèchement, est-il bien placé pour une posture de protecteur de nos libertés? Avant et après les événements de 2015, de manière constante depuis des années, à travers les alternances, et en pleine collaboration de tous les partis de gouvernement, l’État français n’a cessé d’affirmer son droit à écouter (sinon à entendre) , espionner, enregistrer les échanges des français, les partager avec des États tiers, en conserver et en utiliser en grand nombre les données.

Enfin, du fait de son incapacité politique à comprendre ses adversaires, l’État français entend appliquer ce traitement exceptionnel à tous et tout le temps, définir statistiquement les comportements normaux et les déviants, au risque d’une explosion des méprises.

Sur sa volonté de ne rien comprendre, il suffit écouter M. Valls (lire l’intéressant article du docteur Jean Yves Nau). J’avais commis, sur mon blog, un article comparant la police du temps de Fouché et la police algorithmique et annonçant l’echec de celle-ci, encore qu’on nous la présentât (avant le 13 novembre) comme l’arme absolue pour détecter les signaux faibles jusque dans la tête des terroristes.

Au delà d’une prétention proprement totalitaire, on entre dans … le burlesque.

Le même site Numerama s’est fait l’écho de la volonté de Mme Kosciusko-Morizet d’installer des backdoors à l’usage de la police. Or c’est très proprement une stupidité. Et puisque cette dame n’est pas le premier responsable politique à la proférer, il ne faut pas se lasser d’y répondre.

M. Obama, Mme Clinton, M. Cameron, et même le gouvernement français dans son délire de toute-puissance ne peuvent demander aux mathématiques un miracle particulier.  Le patron du FBI est sûr qu’on peut lui trouver un truc. Mais cela fait rire. Il semble qu’Obama aussi attende un miracle. Mais cela fait rire.

Je ne parle pas de miracle au hasard. Il s’agit bien de croire que l’on va modifier l’ordre naturel des choses. J’avais écrit sur mon blog un billet sur l’affaire dite des convulsionnaires, où un plaisant avait fini par dire que le roi de France voulait empêcher Dieu de faire des miracles à défaut de les produire lui même.

La chute des corps graves ou la fission des atomes lourds sont des lois physiques insensibles aux injonctions politiques. Cela a des aspects positifs ou négatifs, c’est selon l’usage et l’usager. Il y a de même des lois mathématiques qui s’imposent à tous, quelque soit leur rang, et qui sont étrangères au volontarisme politique. La somme des angles d’un triangle ne peut être de 179° pour satisfaire un programme politique. La cryptographie repose sur l’usage de fonctions mathématiques irréversibles, même par un élu ou un fonctionnaire.

Il y a quelque chose d’étrange à voir des gens qui ne sont pas avares de référence aux « lois » dans d’autres domaines où elles ne sont qu’abus de langage, vouloir les bousculer là où elles sont de fer. Je pense à l’économie, où des bricolages mathématiques sont prestement et abusivement intronisés sous le nom de « lois de l’économie » pour masquer de simples rapports de force sociaux ou politiques. Sans doute est-ce de cet usage qu’est née la conviction qu’une loi mathématique ou physique pouvait être amendée ?

clé de secours

Puisque l’on parle de backdoor, filons la métaphore.  Si la porte de secours est fermée à clé, de l’intérieur, celui qui est à l’extérieur, qu’il soit policier ou voleur, ne peut que tenter de l’enfoncer, s’il le peut. Or la porte cryptographique ne s’enfonce point. Ce que demandent les politiques c’est donc que l’on mette une clé de secours, du genre de ceux que l’on met pour les pompiers, mais qu’on la mette non à l’intérieur (du côté du propriétaire) mais à l’extérieur !

Or ainsi placée, il n’est pas difficile de comprendre qu’elle servira de la même façon au gendarme et au voleur. Alors certes, la petite armoire peut avoir une clé. L’usage fait que cette seconde clé reste généralement sur l’armoire, ou pendue à un clou à côté.  Mais fut-elle dans un tiroir du gendarme qu’il reste possible de voler le gendarme, ou de bidouiller la serrure.

Faut-il rappeler que le Pentagone, le fisc américain, le fisc français, les sites des banques ou celui Ashley-Madisson se sont tous fait hacker? Et que les clés asymétriques ont été justement inventées pour cela ?

Les hommes et femmes politiques qui, légitimement soucieux d’accompagner, voire de favoriser, l’émergence d’une nouvelle économie, désirent prendre des initiatives utiles et marquantes ne manquent pas de chantiers où s’employer.

Encore faut-il éviter de parler, comme Madame Delphine Batho, de l’exercice, dans le cyberespace, de la souveraineté nationale. Parce que cela n’a simplement aucun sens. Je l’ai écrit ailleurs, au sujet du bitcoin, le cyberespace nous place face aux limites de la pensée, en tout cas pour ceux qui pensent avec leurs pieds, sur le plancher des vaches, et qui vont y rester.

Le cyberespace n’a pas de plage où planter sa bannière comme en 1492.

1492
Christoph Colomb arrive sur le territoire américain (D. Puebla, 1862)

L’enjeu politique serait bien plutôt de faire de la France, juridiquement, politiquement (et fiscalement, mais ce n’est pas forcément le premier souci) le meilleur point de contact entre ce monde-ci et le cyberespace. C’est la chose à laquelle les responsables politiques devraient réfléchir, autrement que sous le coup des émotions, et en intelligence avec les explorateurs du cyberespace.

Peinture de couverture : Louis XIV recevant l’ambassadeur de Perse (Nicolas de Largillière 1715)

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Bitit : interview à la carte https://le-coin-coin.fr/3381-bitit-interview-a-la-carte/ https://le-coin-coin.fr/3381-bitit-interview-a-la-carte/#respond Mon, 11 Jan 2016 09:00:48 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=3381 Dans le Bitcoin, une problématique revient assez fréquemment, c’est celle des moyens d’obtenir pour l’utilisateur lambda ses premiers bitcoins. Il y a quelques années cela ressemblait au parcours du combattant. Cela tend à se simplifier mais reste encore assez compliqué. Notamment du fait de la qualité intrinsèque du Bitcoin qui est non-répudiable et qui fait […]

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Dans le Bitcoin, une problématique revient assez fréquemment, c’est celle des moyens d’obtenir pour l’utilisateur lambda ses premiers bitcoins. Il y a quelques années cela ressemblait au parcours du combattant. Cela tend à se simplifier mais reste encore assez compliqué. Notamment du fait de la qualité intrinsèque du Bitcoin qui est non-répudiable et qui fait que le moyen de financement à distance correspondant à cette propriété est le virement bancaire.

De plus il faut montrer pate blanche sur la majorité des plateformes d’échange ou des brokers. Ainsi Bitit veut révolutionner de l’achat de Bitcoin avec des cartes prépayées physiques. Celles-ci permettent d’acheter facilement ses premiers bitcoins. La seule limite à cette simplicité étant le nombre de points de vente disponibles. Pour pallier à cela il est aussi possible d’acheter des bitcoins en ligne sur Bitit. Nous avons profiter de cette sortie quelque peu récente pour interviewer l’un des fondateurs de cette jeune startup : Nicolas Katan.

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Nicolas Katan

Nicolas, peux-tu nous dire promptement qui es-tu ?

Je suis le co-fondateur et CEO de Bitit, j’habite Paris et j’ai fait des études de Marketing.

Comment as-tu découvert Bitcoin ? A quand cela remonte-t-il ?

Nous étions déjà très intéressés par les moyens de paiement alternatifs et c’est à ce moment-là, il y a environ 3 ans, que nous avons découvert Bitcoin. Comme tout bon bitcoiner nous avons commencé à miner du Bitcoin et d’autres crypto-monnaies avec mes associés.

Pourquoi cet intérêt dans le Bitcoin? (conceptuel, spéculatif, etc…)

C’est avant tout une technologie révolutionnaire, qui casse les codes, avec une symbolique très forte de monnaie d’Internet. Plus qu’une simple devise, la technologie Bitcoin est un formidable canal de transactions, mais l’accès y est encore très restreint.

Peux-tu nous expliquer en quoi consiste Bitit ?

Nous voulons démocratiser l’achat de bitcoins pour tous au travers d’un outil populaire et connu de tous : une carte cadeau.

Bitit est une carte cadeau prépayée de 25€ à 250€ convertible en Bitcoin. La carte est libellée en Euros, ainsi les fonds de de la carte peuvent être convertis en bitcoins sur la plateforme Bitit à tout moment et l’utilisateur garde le contrôle total sur le taux de change. C’est clairement l’outil le plus simple pour acheter, offrir et recevoir des bitcoins.

C’est le meme processus qu’avec une carte cadeau Amazon, l’utilisateur détient un code qu’il convertit en cadeaux Amazon, dans le cas de la carte cadeau Bitit il la convertit en bitcoins.

Comment cela fonctionne-t-il ?

Pour l’achat de bitcoins en ligne nous proposons plusieurs moyens de paiement : par carte bancaire mais aussi par Sofort Banking.

Nous proposons aussi l’achat de bitcoins en espèces via notre carte cadeau physique chez nos commerçants partenaires, ceux-ci n’ont pas besoin de demander un justificatif d’identité au client.

Pour convertir sa carte rien de plus simple, il suffit de créer un compte, de remplir son profil et d’aller dans la section Convertir.

Quels sont les différents services que vous souhaitez rendre ?

En 2015 nous avons lancé un service d’achat de bitcoins en ligne au travers d’une carte cadeau digitale. En 2016 nous allons nous concentrer sur la pénétration du marché international avec la carte cadeau physique disponible en point de vente, mais aussi sur l’expansion de nouveaux moyens de paiement disponibles pour l’achat en ligne. Nous allons également créer un portefeuille Bitcoin disponible gratuitement pour nos utilisateurs. Bitit est un service tout-en-un, la boucle sera bouclée de l’achat jusqu’à la réception, l’utilisateur n’aura pas à faire une multitude de recherches complexes sur où et comment acheter et stocker ses bitcoins.

Y’a-t-il des pistes de développement de l’entreprise que tu aimerais nous livrer ?

Un de nos objectifs est de pouvoir proposer les cartes cadeaux Bitit en tant que moyen de paiement. Autrement dit, l’utilisateur pourrait directement payer avec sa carte digitale ou physique ( soit avec son solde Euro ou soit avec sa balance Bitcoin ) chez nos commerçants partenaires.

Que penses-tu de la mania actuelle sur la Blockchain ?

Arrêtons de parler de la Blockchain mais à la place : agissons, créons, développons ! Blockchain et Bitcoin sont intimement liés. Après la hype autour de la blockchain, il est temps de créer de véritables solutions apportant une réelle valeur à l’écosystème. Le plus important pour nous est de rendre cette technologie la plus accessible possible.

Le futur, pour toi, à quoi ressemble-t-il ?

À un monde meilleur avec Bitcoin.

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La Blockchain à la Fac ! https://le-coin-coin.fr/3265-blockchain-a-fac/ https://le-coin-coin.fr/3265-blockchain-a-fac/#comments Sun, 20 Dec 2015 15:08:12 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=3265 On remarque depuis quelque temps que le Bitcoin et plus particulièrement la Blockchain prend de plus en plus d’importance. Cependant pour qu’un objet soit considéré comme sérieux, outre l’intérêt du public et des politiques, il demeure l’importance des publications universitaires. Et pour ce qui est du Bitcoin pour l’instant les prises de position des chercheurs […]

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On remarque depuis quelque temps que le Bitcoin et plus particulièrement la Blockchain prend de plus en plus d’importance. Cependant pour qu’un objet soit considéré comme sérieux, outre l’intérêt du public et des politiques, il demeure l’importance des publications universitaires. Et pour ce qui est du Bitcoin pour l’instant les prises de position des chercheurs sont assez rares. Toutefois on peut relever un universitaire français qui témoigne un certain intérêt pour le Bitcoin et qui produit des documents accessibles en ligne. C’est Jean Paul Delahaye qui a déjà écrit sur le Coin Coin, professeur émérite à l’université de Lille 1.

Du reste le milieu universitaire s’exprime dans quelques revues spécialisées telle la Revue Banque mais ne semble pas encore trop concerné par le sujet. À l’inverse on a pu voir un MOOC sur le Bitcoin réalisé par un professeur de Princeton et de nombreuses autres initiatives similaires dans les pays anglo-saxons. De là à penser que la recherche francophone est plus rigide il n’y a qu’un pas. Cependant on voit de plus en plus de désir de formation sur le sujet avec par exemple la certification Eureka ou la formation de Canton Consulting. Mais le milieu universitaire semble enfin pouvoir être pénétré, du moins en France, et Jérémie Dubois-Lacoste dispense ce mois-ci un cours sur le sujet à l’Université du Littoral Côte d’Opale à Calais.

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Jérémie Dubois-Lacoste

À l’occasion de ses cours qui commencent nous l’avons interviewé pour en savoir un peu plus sur la question :

Peux-tu te présenter rapidement ?

J’ai un background informatique universitaire. D’abord un master de l’université de Nantes, dont je suis originaire. Par la suite j’ai effectué un doctorat en optimisation combinatoire au laboratoire d’intelligence artificielle à l’université libre de Bruxelles (ULB) : en gros j’essaye d’inventer et d’écrire des algorithmes qui résolvent des problèmes fondamentaux comme le « voyageur de commerce », et qui le font mieux que les algorithmes existants. J’ai ensuite été financé ces deux dernières années comme chercheur, travaillant sur des projets Européens. Je vis toujours à Bruxelles.

Depuis quand t’investis-tu dans le Bitcoin ?

Depuis fin 2012. J’ai été assez vite fasciné et j’ai « plongé » en m’investissant rapidement sur de multiples fronts : techniquement en développant des services basés sur Bitcoin, socialement en fondant et organisant le groupe meetup de Bruxelles, puis l’association Belge et en ce moment en participant à la création du « Cercle du coin ». Peu à peu mes activités « crypto » se sont professionnalisées. En parallèle de mes activités de recherche j’ai fondé avec deux amis également docteurs en informatique et « bitcoiners » de la première heure une société de consulting : Cryptosphere Systems. On propose du consulting de recherche et/ou développement sur Bitcoin mais aussi dans le domaine plus général des systèmes reposant sur le concept de blockchain. Enfin, certains projets personnels sont dans les tuyaux, j’espère qu’ils verront le jour prochainement de manière formelle. Afin de me consacrer pleinement à ces activités, j’ai décidé pour un an de ne pas m’engager dans un nouveau contrat de recherche à l’université. Pendant cette période je reste néanmoins officiellement attaché à l’université (j’y garde même mon bureau), et je n’ai pas l’intention de me couper de la recherche totalement. Mais la « Blockchain » est désormais mon boulot et la recherche mon hobby, l’exact inverse de ce que je fais depuis quelques années.

Passons au choses sérieuses … Peux-tu nous expliquer quelle est la formation/cours que tu vas dispenser ?

Il s’agit d’un cours intitulé « Blockchain et consensus décentralisé », dispensé aux M2 informatique spécialité « Ingénierie des Systèmes d’Information DIStribués » (ISIDIS).

Le nombre d’heure est limité par rapport à leurs cours plus habituels car c’est une première, pour l’université, pour les étudiants et moi-même.

L’idée est de leur donner une idée du concept nouveau de consensus décentralisé tel que proposé avec l’introduction de Bitcoin. Comment on y arrive techniquement (ce qu’on ne savait pas faire il y a 7 ans !), et un aperçu de ce qu’on peut faire avec. J’ai choisi de passer d’abord plusieurs heures à présenter Bitcoin. Si historiquement ça a été la vraie innovation dans ce domaine, je crois que ça reste aussi la meilleure introduction pour des informaticien : se pencher sur un système particulier pour le comprendre, et ainsi digérer les grands principes qui le gouvernent. Ces principes sont tellement nouveaux, même pour des informaticiens, qu’il est difficile de les aborder de front de manière purement abstraite. Ensuite on peux généraliser et passer en revue les différents types de systèmes basés sur des blockchains, par exemple les systèmes fermés (« private blockchains »), les systèmes privés (« permissioned blockchains »). Ces différentes solutions partent de postulat de départ très différents et offrent des caractéristiques assez différentes à leurs utilisateurs. L’idée générale n’est pas de faire des étudiants des experts sur le sujet, mais de les familiariser et les inviter à réfléchir à ces concepts. Par la suite ça fera déjà une énorme différence s’ils doivent approcher le sujet dans leur vie professionnelle. Ils ne le réalisent pas, mais il est probable que dans quelques années le sujet soit aussi « hot » que les « big data » aujourd’hui. Ces formations vont certainement se généraliser et le consensus décentralisé, l’idée de preuve de travail, seront des composantes habituelles de nombreux cursus informatiques dans l’avenir.

Comment as-tu obtenu cette proposition, cela vient de toi ou de l’université ?

Le responsable du Master 2 est une connaissance car on travaille dans le même domaine de recherche. On se retrouve donc régulièrement à droite à gauche sur des conférences scientifiques. On avait justement discuté de Bitcoin à Madrid en juillet. Ayant ensuite lu un peu sur le sujet, il a été suffisamment intéressé et m’a demandé si j’accepterais de donner un cours aux étudiants de M2 cette année. J’étais évidemment enthousiaste, et je suis persuadé que c’est une bonne chose pour ce cursus de master, les étudiants, et au delà pour l’université du Littoral Côte d’Opale qui montre ainsi un certain esprit d’initiative. A ma connaissance, il n’y avait que trois universités dans le monde qui dispensent officiellement des cours sur le sujet : le MIT, Stanford, et Nicosie en Chypre. Cette année il faut aussi compter avec Calais. Cocorico !

Penses-tu que les choses sont en train de s’ouvrir chez les universitaires ?

Tout doucement. Pour le moment, plus lentement que ce qu’on voit sur le marché du travail privé en tout cas. Il y a pourtant certains universitaires influents qui sont ouvertement intéressés, mais peu s’impliquent concrètement, que ce soit pour insérer les blockchains dans les cursus ou monter des projets de recherche. Il est compliqué  lorsqu’on fait une carrière académique de s’impliquer vraiment dans un sujet parallèle à son sujet « habituel », sur lequel on a basé sa carrière et pour lequel on est reconnu. Je pense que cela demandera une nouvelle « génération » de scientifique. Je veux dire par là qu’en plus des mémoires de fin d’études, de plus en plus de doctorats commencent aujourd’hui à être financés sur le sujet : lorsque dans quelques années ces futurs docteurs seront en mesure de trouver des financements par eux-mêmes, on verra une explosion de projets sur le sujet. C’est la situation actuelle dans le monde, mais en France en particulier, on ne brille pas par notre avance pour le moment.

Quel est ton avis sur la dichotomie actuelle entre Bitcoin et blockchain ?

On entends beaucoup d’avis très tranchés sur la question. D’un coté on a les « maximalistes » Bitcoin, qui sont persuadés que tout autre système mentionnant « blockchain » de près ou de loin est voué à l’échec, qu’il ne doit en rester qu’un et que ce sera Bitcoin, sur lequel viendra se greffer tout le reste. De l’autre, on a ceux qui sont ouvertement fans de « la blockchain » mais préfère jeter Bitcoin aux oubliettes ou même tirer dessus à boulet rouge. Ce dernier point de vue vient souvent de l’establishment, des banques ou institutions financières, il est donc parfois difficile de percevoir le fond de leur pensées puisqu’ils sont tenus à des impératifs de communications strictes. Exemple de cette ambiguïté : on entend souvent que les dirigeants de grande institution financières très critiques vis-à-vis de Bitcoin possèdent personnellement des bitcoins. Ceux-là développent souvent leurs propres blockchains « autorisées » ou complètement « privées ».

Le point de vue rationnel se trouve entre ces deux extrêmes. Il existe de nombreuses architectures possibles entre, d’un coté, Bitcoin qui prends le parti du « zero confiance » et de l’autre coté, on arrive à ce qui existait déjà : une base de données partagée. Chacune de ces architectures aura des caractéristiques propres (sur les conditions pour qu’elle fonctionne et sur ce qu’elle permet de faire à ces utilisateurs). Comme souvent en informatique c’est une affaire de compromis : par exemple ce qu’on perd en performance, on le gagne en robustesse et vice-versa. Ici la vision des « maximalistes » est souvent faussée : ils mesurent l’intérêt d’une architecture donnée par son seul degré de nouveauté par rapport aux systèmes actuels. Dans ce contexte, évidemment Bitcoin gagne haut la main. Ce n’est pourtant pas toujours le plus adapté à toutes les applications.

Concrètement, je pense que tout système qui se veut global et ouvert, aura beaucoup de mal à exister face à Bitcoin qui devrait donc continuer à jouer un rôle prédominant. Mais certains systèmes n’ont certainement pas vocations à être à la fois globaux et ouverts, et pour ceux-là Bitcoin n’est pas l’unique ou le meilleur choix.

Comment vois-tu l’avenir de la recherche sur le sujet, et des objets étudiés ?

Pour Bitcoin en particulier, il y a déjà pas mal de recherches liées aux aspects de confidentialité sur l’analyse de la blockchain et du réseau peer-to-peer. Je pense que cela va continuer, il y a une énorme base de connaissances en data mining qui trouve ici un nouveau champ d’application. Les problèmes de performance et d’extensibilité (« scalability ») font actuellement l’actualité, mais un point plus crucial qui devrait concentrer beaucoup d’attention dans l’avenir est le « block reward », le montant de nouveau bitcoins qui vont au mineur de chaque bloc. Plus précisément sa réduction, voir son absence à long terme, pose des questions qui me paraissent assez fondamentales, comme la possibilité d’avoir un « marché des fees » qui fonctionnent ou pas. Je rappel que sans « block reward », si un mécanisme naturel ne se met pas en place pour le compenser par les frais de transactions, c’est l’incitation des mineurs et donc la sécurité de la blockchain qui est remise en cause.

Plus généralement, on sait encore très peu comment concilier les besoins de confidentialité des individus et des entreprises dans le monde réel, avec la transparence nécessaire à un système décentralisé ou chaque participant doit pouvoir vérifier la validité de ce qui s’y passe. Cette contradiction a, je pense, ralenti l’adoption de cette technologie dans certains secteurs, comme le monde financier. Il existe déjà des pistes (je travaille personnellement sur certaines) et il y aura certainement beaucoup de recherche dans cette direction.

Quand à la science économique en générale, elle me parait souvent peu à même d’étudier le phénomène correctement pour l’instant, donc j’imagine qu’il y a énormément de recherches voir de remises en cause à faire dans ce domaine.

Crédit Photo : Emilien Etienne

Cet article La Blockchain à la Fac ! est issue du site Le Coin Coin.

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Bitcoin et la hargne des chevaux de retour https://le-coin-coin.fr/3073-bitcoin-hargne-chevaux-de-retour/ https://le-coin-coin.fr/3073-bitcoin-hargne-chevaux-de-retour/#comments Mon, 23 Nov 2015 10:48:43 +0000 https://le-coin-coin.fr/?p=3073 (Je souhaitais publier cet article simultanément sur le Cercle des Echos, puisqu’il répond à un billet délirant paru sur ce même site. Cela n’a pas été possible, ce qui démontre l’urgence de doter le bitcoin français d’institutions représentatives et capables de se faire entendre) Le sang des victimes est à peine séché que la vie ordinaire a […]

Cet article Bitcoin et la hargne des chevaux de retour est issue du site Le Coin Coin.

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(Je souhaitais publier cet article simultanément sur le Cercle des Echos, puisqu’il répond à un billet délirant paru sur ce même site. Cela n’a pas été possible, ce qui démontre l’urgence de doter le bitcoin français d’institutions représentatives et capables de se faire entendre)

Le sang des victimes est à peine séché que la vie ordinaire a repris ses droits sous son nouveau nom d’état d’urgence. Comme avant, le gouvernement espère que l’union sacrée lui profitera ; comme avant, les marchands de systèmes de sécurité présentent leurs gadgets comme des solutions ; comme avant, les maniaques du contrôle social dénoncent nos libertés comme autant de mensonges qui nous font tant de mal.

Il n’a pas fallu huit jours pour que le bitcoin essuie, si l’on peut dire, de nouvelles rafales. Parce qu’on le soupçonne de servir aux terroristes. Les experts français ne font jamais que citer des rapports européens, qui laissent entendre que les Américains ont entendu dire que des Israéliens auraient vu passer une preuve de la chose. La presse grand public croit en avoir assez fait quand elle cesse de se recopier elle-même pour recopier de semblables « experts ». Il ne manque pourtant plus de sites où l’on peut aller sourcer de l’information rédigée en langue française par des gens qui comprennent la chose et sont conscients de ses enjeux : Bitcoin.fr , le-Coin-Coin, fr.newsbtc… Mais comme l’écrit ce dernier site en abordant le mythe du bitcoin et du Daech, plus c’est gros plus ça passe.

Répétons donc à l’intention des enquêteurs (juges et journalistes) et même si c’est sans trop d’espoir, qu’on a la certitude (pas le soupçon) que les terroristes se servent des billets de la BCE et de la Fed comme vous et nous, qu’ils emploient les services des banques et pas seulement de Cofidis pour une mitraillette, mais bien de la City et à hauteur de plusieurs milliards et des dizaines de succursales bancaires diverses qui opèrent toujours, mais sous leur contrôle désormais, en Syrie et en Iraq.

Mais quand les rafales viennent non plus de magistrats peu formés, de policiers débordés, ou de journalistes copieurs-colleurs, mais d’un retraité de la Banque de France, sans doute n’est-il pas suffisant de s’en tenir à cette forme de protestation.

Il y a quelque chose d’obscène dans l’instrumentalisation d’un climat de deuil à des fins qui paraîtront aussi futiles aux personnes endeuillées ou blessées. Quand bien même les mitraillettes du 13 novembre auraient toutes été payées en bitcoin, Satashi Nakamoto serait aussi innocent de ces crimes que ne le sont les pères de l’euro parce que les armes ont été payées avec du cash signé Draghi. En revanche les assassins seraient plus faciles à retrouver, parce que l’exploration de la blockchain est plus aisée que le traçage du cash. La plupart des diatribes contre le bitcoin sont ridiculement ignares sur ce point, alors que de nombreuses start-up travaillent sur ces thématiques.

De toutes façons, ce n’est pas la monnaie virtuelle qui tue, ce n’est pas la cryptographie qui tue, ce n’est pas même l’auto-radicalisation sur Internet qui tue. Ce sont les mitraillettes et les ceintures d’explosif qui tuent. Un fanatique expert en cryptographie, si tant est que cela existe, tant qu’il a des crayons de couleur et de la pâte à modeler pour jouer, ne trouble pas l’ordre public.

Les banquiers aiment les chiffres. Citons ceux du bitcoin d’abord: une capitalisation inférieure à 5 milliards de dollars, des transactions quotidiennes moyennes de l’ordre de 5 millions, avec moins de 10 journées sur les 365 dernières au dessus de 10 millions. Pas de quoi financer le centième de tout ce dont on l’accuse à tour de rôle en temps de paix, drogue (500 milliards ?), évasion fiscale (50 milliards par an pour la France ?) pédophilie (3 à 20 milliards ?) et quelques autres horreurs encore.

Pour les chiffres concernant les armes maintenant, on en trouve sur le Huffington. Il y aurait 10 millions d’armes en France, dont 6 millions d’armes illégales. Mais certaines sources citent des chiffres doubles, sans même compter ce qu’on trouve en Belgique ou en Suisse). En face, la police aurait saisi… 175 armes de guerre en 2014. Le trafic d’armes illégales dispose d’arsenaux de guerre tombés aux mains de civils ou d’organisations mafieuses, ce qui veut dire que, des armes venant des Balkans à celles venant de Libye, c’est déjà vous, amis lecteurs, qui les avez payées avec vos impôts. Elles sont à vous. Que nos policiers les reprennent. Je propose une loi exigeant une saisie minimale de 5.000 armes de guerre entre deux lois de sécurité. Cela augmenterait la sécurité réelle tout en freinant la dérive sécuritaire qui n’est qu’une pollution politique.

Il y a aussi quelque chose d’idiot à penser que les autorités autorisent trop facilement les monnaies privées. D’abord pour une raison de droit : les autorités (en gros : les jeunes collègues qui ont remplacé l’auteur) peuvent interdire quelque chose au nom d’une loi existante ou susciter une loi nouvelle qui en prévoit l’interdiction. Mais dans une démocratie, ce qui n’est pas interdit est autorisé de facto ; les autorités n’ont pas à nous autoriser les choses. Ensuite pour une raison de fait : on pourrait interdire l’usage du bitcoin, à la condition de pouvoir mettre en œuvre cette interdiction. Les Russes s’y essaient, mais jusqu’à il y a peu de temps, ce pays n’était pas donné en modèle. Mais on ne peut interdire une chose immatérielle, non localisable, non saisissable et qui échappe par sa nature meta-physique à la crise d’autorité des états territoriaux. Dire qu’on autorise trop facilement le bitcoin est donc un propos sans queue ni tête. Dire qu’on veut élargir considérablement le champ des circuits de face à face sans préciser l’identité de ce « on » – autorités ? entrepreneurs ? – prouve le flou de l’information et l’embarras de la pensée.

Il y a enfin quelque chose de pathétique qui exsude du toute rhétorique contre « le monde moderne ». Pour un historien, le monde moderne commence en 1492 pour s’achever plus ou moins en 1789. Ces dates ne sont pas choisies au hasard ; elles nous rappellent que les autorités n’ont pas pu interdire l’imprimerie et le nouveau Monde, ni l’Encyclopédie et l’esprit des Lumières. Mais pour un réactionnaire, le monde moderne désigne tout bêtement les choses dans la rue qui lui font peur, les jeunes avec leur musique différente de la sienne, l’Internet plein de saletés qui a remplacé les journaux du temps de Marcel Dassault, la multiplication de nouveautés dont il ne comprend pas l’utilité et qu’il perçoit comme une course à la technologie pour la technologie, les conversations auxquelles il ne pourrait pas même faire semblant de participer. Pour certains financiers dépassés, le bitcoin est sulfureux. Pour certains imams ringards, c’est la musique des jeunes qui vient du diable. Sont-ils si différents ?

Les chevaux de retour qui voudraient revenir à ce qu’ils ont connu au début de leur carrière ont oublié que le système de monnaie papier des années 70 n’était ni une invention mûrement pensée ni une révolution audacieusement menée mais une improvisation face à un un état de fait. Et quand ils se drapent dans le souci de la sécurité publique, ils oublient aussi que le système bancaire régulé depuis la rue Vivienne, les « trois vieilles » administrées depuis la rue de Rivoli, le contrôle des changes et les baraques de douaniers sur toutes les frontières n’empêchaient pas les attentats des années 70 et 80 financés par des braquages (donc par du cash) et par des États étrangers.

Pendant que les policiers ramasseraient enfin les kalachnikov (beaucoup plus nombreuses que jadis) au lieu de jouer les Morpheus algorithmiques, les banquiers devraient s’attacher eux aussi à faire leur métier plutôt que celui d’autrui : malgré l’euro, malgré le Sepa, malgré la plupart des « applications maisons », il est toujours long et coûteux et il est souvent éprouvant d’envoyer 5 euros de Paris à Bruxelles. Comme le disait Nelson, qui valait bien nos fiers-à-bras, le pays expects that every man will do his duty.

Cet article Bitcoin et la hargne des chevaux de retour est issue du site Le Coin Coin.

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